Comprendre comment les précipitations changent à mesure que la Terre se réchauffe est une question complexe et pourtant cruciale. Dans ce contexte, de récents travaux ont montré que celles-ci deviennent plus variables en climat plus chaud, et dessinent des oscillations plus brutales entre phases humides et sèches. Les résultats paraissent dans la revue Science Advances ce 28 juillet.
De nombreux travaux ont porté sur la façon dont les précipitations évoluent en quantité et en intensité à mesure que le climat global se réchauffe. Mais beaucoup moins sur leur variabilité, bien qu’il s’agisse également d’un élément-clé. En effet, elle influence entre autres l’importance du stress hydrique et la capacité à assurer une gestion adéquate de la ressource en eau.
Un climat plus humide et plus variable pour deux tiers des surfaces continentales
Après avoir finement étudié un ensemble de simulations climatiques à haute résolution dans un scénario de réchauffement marqué, des chercheurs ont récemment pu apporter un éclairage conséquent sur la question. En particulier, les résultats révèlent que les régions humides – i.e. les climats de mousson et ceux des moyennes et hautes latitudes – connaîtront à la fois une augmentation des pluies et une hausse de leur variabilité.
Autrement dit, au lieu de voir l’eau tomber avec une certaine homogénéité sur une saison ou une année, elle tendrait à se concentrer sur des épisodes plus intenses séparés par des périodes sèches exacerbées. Le raisonnement est également pertinent lorsque l’on considère les fluctuations d’une année à l’autre, avec des bascules plus fréquentes d’un extrême à l’autre. Ce type d’évolution affecterait deux tiers des surfaces terrestres.
En ce qui concerne les régions sèches, les auteurs montrent qu’elles deviendront plus sèches mais verront de leur côté une baisse moyenne de la variabilité. C’est notamment le cas de l’Atlantique subtropical, d’une partie de l’Afrique du Nord et du bassin méditerranéen. Ce type d’évolution concernerait moins d’un tiers des terres. Les détails des changements apparaissent sur la figure ci-dessus.
« À mesure que le climat se réchauffe, les régions humides deviendront généralement plus humides et les régions sèches deviendront plus sèches. De plus, l’augmentation de la variabilité des précipitations en moyenne mondiale est plus de deux fois plus rapide que l’augmentation des précipitations moyennes [N.D.L.R. 1 % à 3 % par degré] », précise Zhou Tianjun, auteur principal du papier.
Précipitations : les mécanismes responsables des changements de variabilité
Dans leur étude, les scientifiques expliquent que l’augmentation de la variabilité en région humide est liée à la plus grande quantité de vapeur d’eau présente dans l’air lorsque celui-ci gagne en température. Et pour cause, la distribution est élargie vers les intensités de précipitations plus fortes comme illustré ci-après.
En région sèche, où la variabilité diminue parfois, cet effet tend à être contrebalancé par des changements de circulation atmosphérique et d’humidité relative près de la surface. Le régime moteur s’affaiblit et le surplus de vapeur d’eau est alors difficilement utilisable. Ainsi, la distribution n’est pas élargie vers les intensités plus fortes et peut même se contracter vers des intensités de précipitations plus faibles comme illustré ci-après.
« La variabilité amplifiée des précipitations à l’échelle mondiale manifeste le fait que le réchauffement climatique rend notre climat plus inégal – plus extrême dans des conditions humides et sèches, avec des transitions plus larges et probablement plus rapides entre elles », note Kalli Furtado, coauteur de l’étude. « Les événements de précipitations plus variables pourraient en outre se traduire par des impacts sur les rendements des cultures et les débits des rivières, remettant en cause la résilience climatique des infrastructures, de la société humaine et des écosystèmes ».