Vénus : une étude pour lever le voile sur la phosphine

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La planète vénus. Crédits : JAXA

Le projet Breakthrough Initiatives va financer une étude pour approfondir la découverte de la phosphine dans l’atmosphère de Vénus. L’experte en bio-signatures Sara Seager dirigera l’équipe de chercheurs.

Le 14 septembre dernier, la Royal Astronomical Society annonçait une découverte intrigante : des astronomes ont en effet isolé la présence de phosphine dans les nuages de Vénus, à une altitude où les températures et les pressions sont similaires à celles ici enregistrées au niveau de la mer sur notre planète. L’annonce est particulièrement excitante dans la mesure où, sur Terre, nous savons que la phosphine peut être produite par des bactéries anaérobies. Accessoirement, ces molécules peuvent également être synthétisées en laboratoire, notamment pour lutter contre les nuisibles.

Évidemment, le fait d’isoler la signature spectrale de la phosphine dans l’atmosphère de Vénus ne signifie pas nécessairement que l’on a découvert une vie extraterrestre. Si des microbes vénusiens pourraient potentiellement produire ces molécules, il est également possible que la substance soit générée par des réactions chimiques exotiques que nous ne comprenons pas encore, et qui n’ont rien à voir avec la vie.

Approfondir la découverte

L’annonce reste néanmoins suffisamment importante pour que le monde scientifique s’y intéresse davantage. Dans cet esprit, le projet Breakthrough Initiatives, un programme de recherche de vie extraterrestre, va financer une étude dans le but d’approfondir la découverte et d’analyser ses implications potentielles.

Ces travaux seront dirigés par Sara Seager, spécialiste des planètes du MIT. Elle est également membre de l’équipe de découverte de la phosphine. Elle sera accompagnée de Janusz Petkowski (du MIT), Chris Carr (Georgia Institute of Technology), Bethany Ehlmann (California Institute of Technology), David Grinspoon (planetary Science Institute), et de Pete Klupar (ingénieur en chef du programme Breakthrough Initiatives).

«Nous sommes ravis de repousser les limites pour essayer de comprendre quel genre de vie pourrait exister dans l’atmosphère très dure de Vénus», a déclaré Pete Worden, directeur exécutif de l’organisation à but non lucratif.

«Trouver la vie n’importe où au-delà de la Terre serait vraiment mémorable», a également souligné le milliardaire Yuri Milner, qui finance en grande partie le programme Breakthrough Initiatives «Et s’il y a une chance non négligeable que ce soit juste à côté de Vénus, explorer cette possibilité est une priorité urgente pour notre civilisation». Le communiqué ne révèle en revanche pas le budget de cette étude, ni sa durée.

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Représentation de la molécule phosphine (PH3) / ESO/M. Kornmesser/L.Calçada & NASA/JPL/Caltech

Encore un long chemin

Ainsi, « la plus grande découverte scientifique de toute l’histoire » devra attendre encore un peu. Car, comme le disait si bien l’astronome Carl Sagan : «des affirmations extraordinaires nécessitent des preuves extraordinaires».

Pour confirmer la présence d’une véritable bio-signature sur Vénus, nous devrons d’abord appréhender tous les processus atmosphériques de cette planète, qui sont encore mal compris. Nous devrons également nous assurer qu’aucun autre processus physico-chimique et géophysique puisse également expliquer la présence de cette phosphine. Autrement dit, prouver que ces molécules, sur Vénus, ont bel et bien une origine biologique. En cas de consensus scientifique, nous pourrions alors envisager de l’étudier plus en détail, avant de confirmer sa présence.

On imagine évidemment difficilement des microbes de « type terrestre » évoluer dans l’atmosphère de Vénus. Si ces molécules ont été repérées à une altitude où les températures et les pressions sont relativement similaires à celles de la Terre, rappelons que les nuages ​​vénusiens sont principalement composés d’acide sulfurique. Cet environnement particulièrement corrosif tuerait probablement rapidement nos microbes, «à moins qu’ils ne soient entourés d’une sorte de coquille protectrice», explique Sara Seager.

Mais la vie de Vénus, si tant est qu’elle existe, pourrait très bien ne pas être semblable à celle de la Terre, et ne pas dépendre de l’eau pour survivre.