De la vapeur d’eau détectée pour la première fois sur Ganymède

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Ganymède photographiée par la sonde Juno en 2022. Crédits : NASA

En s’appuyant sur les données du télescope Hubble, des astronomes ont découvert les premières preuves de vapeur d’eau dans l’atmosphère de Ganymède, la plus grande lune de Jupiter. Cette vapeur d’eau se forme lorsque la glace de la surface de la lune passe de l’état solide solide à l’état de gaz.

Ganymède, la plus grande lune de Jupiter et du Système solaire, contient plus d’eau que tous les océans de la Terre. Une grande partie de cette eau forme un océan souterrain retrouvé à environ 150 km de profondeur. En surface, les températures sont si fraîches que l’eau ne se trouve qu’à l’état solide. Du moins, c’est ce que l’on pensait jusqu’à présent. En analysant plusieurs ensembles de données nouvelles et archivées du télescope Hubble, une équipe annonce en effet avoir isolé des traces de vapeur d’eau en surface. Les détails de l’étude sont rapportés dans la revue Nature Astronomy.

Aurores mystérieuses

En 1998, le spectrographe imageur de Hubble avait capturé les premières images ultraviolettes (UV) de Ganymède, révélant alors des bandes aurorales (bandes colorées de gaz électrifié) en surface. Ces structures étaient à peu de chose près similaires aux ovales auroraux observés sur Terre et sur d’autres planètes ayant un champ magnétique.

Les similitudes dans ces observations ont été expliquées par la présence d’oxygène moléculaire (O2) dans l’atmosphère de la lune. Néanmoins, certaines caractéristiques observées ne correspondaient pas aux émissions attendues d’une atmosphère d’O2 pur. À l’époque, les chercheurs avaient alors conclu que ces différences pouvaient être expliquées par des concentrations plus élevées d’oxygène atomique (photolyse ou décomposition par la lumière de l’oxygène moléculaire).

Dans le cadre d’un programme visant à soutenir la mission Juno, une équipe du Royal Institute of Technology de Stockholm (Suède) a entrepris il y a trois ans de mesurer cette quantité d’oxygène atomique avec Hubble. À leur grande surprise, les chercheurs ont alors découvert qu’il n’y avait en réalité quasiment pas d’oxygène atomique dans l’atmosphère de Ganymède.

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Ganymède photographiée par la sonde Juno le 7 juin 2021. Crédits : NASA/JPL-Caltech/SwRI/MSSS

Sublimation de la glace

Il y a quelques mois, la même équipe a ensuite examiné de plus près la distribution relative de ces fameuses aurores, soupçonnant que les caractéristiques observées en 1998 pouvaient être expliquées par des concentrations de vapeur d’eau (phase gazeuse) libérées par sublimation. Comme sur Terre, la température de surface de Ganymède varie en effet tout au long de la journée, et vers midi, près de l’équateur, elle peut devenir suffisamment chaude pour que la surface de la glace libère de petites quantités de molécules d’eau.

Finalement, les différences perçues dans les images UV étaient bel et bien corrélées à l’endroit où l’eau serait attendue dans l’atmosphère lunaire.

« Jusqu’à présent, seul l’oxygène moléculaire avait été observé« , a déclaré Lorenz Roth, principal auteur de ces travaux. « Ceci est produit lorsque des particules chargées érodent la surface de la glace. La vapeur d’eau que nous mesurons maintenant provient de la sublimation de la glace causée par l’échappement thermique opéré dans les régions glacées plus chaudes« .

La découverte de cette vapeur d’eau ajoute ainsi à la compréhension de l’atmosphère de Ganymède. Ces résultats pourraient également intéresser l’équipe de JUICE (Jupiter Icy Moon Explorer), la prochaine mission de grande envergure de l’ESA qui doit décoller l’année prochaine. Son objectif sera d’étudier de près le système jovien dès 2029, avant de se concentrer exclusivement sur Ganymède dès 2032. Ces données pourraient donc être utilisées pour affiner les plans d’observation.