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Une quantité anormale de vapeur d’eau dans la mésosphère interroge les scientifiques

nuage mésosphérique
Crédits : flickr.

Depuis début juin, de nombreux nuages mésosphériques ont été observés, parfois à des latitudes aussi basses que 35°N. Si leur apparition est classique près des pôles à cette période de l’année, leur extension vers des latitudes aussi méridionales l’est beaucoup moins. En cause, une quantité anormalement élevée de vapeur d’eau dans la haute atmosphère.

Les nuages polaires mésosphériques – aussi appelés nuages noctulescents – sont les nuages les plus élevés que l’on puisse observer sur Terre. En effet, ils se forment à une altitude avoisinant les 80 000 mètres – dans la mésosphère, d’où leur nom. On les rencontre principalement en été près des latitudes polaires, là où la température de la haute atmosphère peut plonger jusqu’à – 130 °C !

En conséquence, la très faible quantité de vapeur d’eau qui s’y trouve se condense autour de poussières d’origine météoritique. Un processus qui mène à l’apparition de voiles nuageux très fins fait de glace – et souvent marqués par la présence de rides. Ils deviennent visibles lorsque l’astre solaire est sous l’horizon et que ses rayons les éclairent par-dessous.

Il existe ainsi une véritable saison des nuages noctulescents. Elle débute fin mai, atteint son point culminant au cours du mois de juillet et se termine vers la fin août. Chaque année, de superbes photos circulent sur les réseaux sociaux.

2019, une année atypique

En fait, il s’avère que la saison 2019 est très atypique, au point qu’elle interroge les scientifiques. Un grand nombre de nuages mésosphériques a été recensé depuis début juin. Certains se sont manifestés à des latitudes anormalement basses. Parmi elles figurent Los Angeles en Californie et Abuquerque dans le Nouveau-Mexique. En Europe, un épisode exceptionnel s’est produit entre le 21 et le 22 juin. Au final, la saison en cours pourrait être la plus prolifique jamais observée dans l’hémisphère nord.

vapeur d'eau mésosphère
Concentration en vapeur d’eau (axe de gauche, en ppmv) à 83 000 mètres, selon la latitude (évolution de l’animation) et le jour de l’année (axe du bas). Les couleurs correspondent aux différentes années, de 2007 à 2019. Cette dernière est en rouge. Crédits : NASA’s Microwave Limb Sounder/ JPL NASA.

« La mésosophère est assez humide », rapporte Lynn Harvey, chercheuse au Laboratoire de physique atmosphérique et spatiale à Boulder (Colorado). « Les concentrations de vapeur d’eau sont à leur plus haut niveau depuis 12 ans ».

C’est ce que montrent les observations satellites de la concentration en vapeur dans la haute atmosphère (voir ci-dessus). Son taux a atteint deux fois sa valeur moyenne aux basses latitudes – entre 35 °N et 45 °N. Un record.

Excès de vapeur d’eau : quelle origine ? 

La cause de cette montée soudaine de la teneur en vapeur d’eau est encore incertaine. Les chercheurs suggèrent un rôle potentiel des ondes planétaires qui auraient stimulé son transport vers la haute atmosphère. Ou encore celui du minimum solaire en cours. En effet, la diminution sensible du rayonnement UV limiterait la photolyse des molécules d’eau. Enfin, notons que le changement climatique contribue probablement à cette évolution, comme mentionné dans un de nos précédents articles.

« Alors que nous entrons dans la troisième semaine de juin, la quantité de vapeur a cessé d’augmenter », tempère Lynn Harvey. « Au nord du 70e parallèle, elle a baissé depuis quelques semaines. Et autour du pôle Nord, c’est devenu très sec. Aux latitudes moyennes (35°N à 65°N), elle est toujours élevée mais se stabilise. »

« Tout ceci indique qu’il y a des mystères dans l’atmosphère qui n’ont pas encore été résolus », soulève James Russel de l’Université de Hampton aux États-Unis. Ce qui est certain, c’est que 2019 permet aux photographes – amateurs ou professionnels – de nous partager leurs plus beaux clichés mésosphériques !

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Damien Altendorf

Rédigé par Damien Altendorf

Habitant du Nord-est de la France, je suis avant tout un grand passionné de météorologie et de climatologie. Initialement rédacteur pour le site "Monsieur Météo", je contribue désormais à alimenter celui de "Sciencepost".