Une plante de 407 millions d’années trompe les chercheurs en ne suivant pas la séquence de Fibonacci

séquence de Fibonacci
Crédits : Sabine Hortebusch/istock

Le monde des plantes suit généralement certaines règles. Par exemple, on pensait auparavant que la séquence de Fibonacci, très présente dans la structure de végétaux existants, devait être apparue très tôt chez les premières espèces. Cependant, l’un des plus anciens exemples de plante à feuilles dans les archives fossiles remet en doute cette idée. 

Séquence de Fibonacci et phyllotaxie

La séquence de Fibonacci est une séquence où chaque nombre est la somme des deux nombres précédents : 0, 1, 1, 2, 3, 5, 8, 13, 21, 34, etc. Elle est étroitement liée à un rapport mathématique spécial appelé le nombre d’or qui est d’environ 1,61803. Ce nombre s’obtient en divisant un nombre de la séquence de Fibonacci par son précédent (par exemple : 5/3 ≈ 1,6667, 8/5 ≈ 1,6, 13/8 ≈ 1,625, et ainsi de suite).

Cette séquence est remarquable, car elle apparaît fréquemment dans divers phénomènes biologiques et géométriques, mais aussi dans la nature. Il existe en effet un lien entre la séquence de Fibonacci et la phyllotaxie des plantes (l’organisation en spirale des organes autour d’une tige). En effet, le nombre d’organes dans une spirale suit souvent une progression proche des rapports de la séquence de Fibonacci. Et en suivant cette progression, vous remarquerez que ces organes émergent souvent à des angles de 137,5 degrés. Cette disposition optimisée permet à chaque organe de recevoir une quantité maximale de lumière du soleil sans se chevaucher. Cela favorise la photosynthèse, la croissance saine et l’efficacité de l’utilisation des ressources.

Naturellement, ce n’est pas une règle stricte, mais ces formations constituant plus de 90 % des spirales observées dans la nature. C’est notamment le cas dans les têtes de tournesol, les pommes de pin, les ananas et les plantes d’intérieur.

Un fossile de 407 millions d’années

Sur la base de leur large distribution, on a longtemps supposé que les spirales de Fibonacci étaient une caractéristique ancienne ayant évolué dans les premières plantes terrestres. Cependant, leur origine évolutive a en réalité été largement ignorée, ce qui nous ramène à cette découverte. Des chercheurs ont en effet examiné des spirales différentes dans un fossile végétal vieux de 407 millions d’années.

séquence de Fibonacci
Des feuilles disposées en spirale peuvent être identifiées à l’extrémité des pousses d’Asteroxylon mackiei. Crédits : Turner et coll., doi : 10.1126/science.adg4014

Les chercheurs ont fait cette observation en produisant les premiers modèles 3D de pousses feuillues du lycopode Asteroxylon mackiei, un membre du premier groupe de plantes feuillues, à l’aide de techniques de reconstruction numérique. Ce fossile exceptionnellement préservé a été trouvé dans le célèbre site fossilifère du chert de Rhynie, dans l’Aberdeenshire, au nord-est de l’Écosse.

Ces résultats, publiés dans la revue Science, suggèrent ainsi que contrairement à aujourd’hui, les « spirales non-Fibonacci » étaient courantes dans les anciens écosystèmes terrestres et que l’évolution des spirales de feuilles a divergé en deux voies. Les feuilles de ces anciens lycopodes auraient en effet une histoire évolutive entièrement distincte des autres grands groupes de plantes d’aujourd’hui comme les fougères, les conifères et les plantes à fleurs.

Cette découverte remet en question les idées préconçues sur l’évolution des structures végétales, en particulier l’omniprésence de la séquence de Fibonacci dans la nature. Les spirales non-Fibonacci observées dans le fossile d’Asteroxylon mackiei suggèrent que les premières plantes terrestres suivaient des règles de développement différentes de celles que l’on observe aujourd’hui. Cette divergence évolutive, qui a donné lieu à des formes végétales distinctes, souligne la complexité et la diversité des trajectoires évolutives dans le règne végétal. Cette découverte souligne également l’importance des fossiles dans la compréhension des évolutions biologiques complexes. En révélant des structures végétales anciennes et inattendues, telles que les spirales non-Fibonacci, les fossiles offrent une fenêtre unique sur les formes primitives de vie terrestre et les mécanismes de développement qui ont précédé les règles mathématiques que l’on associe aujourd’hui aux plantes modernes. Étudier ces échantillons du passé nous permet ainsi de mieux comprendre les processus qui ont façonné la morphologie végétale, montrant que l’évolution suit souvent des chemins divers et parfois imprévisibles.