Des chercheurs de l’Université Rutgers (New Jersey, États-Unis) ont découvert que les reconstructions paléoclimatiques surestimaient notablement les températures de la première moitié de l’Holocène. De fait, il apparaît que la Terre est en réalité au plus chaud depuis au moins 115 000 ans. Un horizon qui nous ramène au précédent interglaciaire. Les résultats ont été publiés ce 27 janvier dans la revue scientifique Nature.
Depuis le début de la révolution industrielle, la température moyenne du globe a augmenté d’un peu plus de 1 °C. Une hausse qui s’est principalement articulée à partir des années 1970. Notons que cette valeur peut sembler faible au premier coup d’œil. Toutefois, il faut réaliser qu’elle est le fruit d’une intégration spatiale et temporelle élargie. Constater des changements de l’ordre du degré à cette échelle d’intégration est très significatif. À titre d’exemple, les fluctuations glaciaires-interglaciaires représentent une variation d’environ 5 °C seulement en moyenne globale.
L’énigme de la température de l’Holocène
Jusqu’à présent, les scientifiques pensaient que les températures actuelles n’avaient pas encore dépassé le pic chaud de l’Holocène – l’interglaciaire actuel – atteint entre 6 000 et 10 000 ans de ça. On parle à ce titre du maximum thermique de l’Holocène. Cependant, de nouveaux résultats viennent remettre en question cette vision. En effet, les travaux des chercheurs ont montré que les reconstructions précédentes surestimaient notablement le niveau des températures entre -12 000 et -5 000 ans.
« Notre reconstruction montre que la première moitié de l’Holocène était plus froide que l’époque industrielle en raison des effets refroidissants dus aux restes de calottes glaciaires de la période froide précédente » indique Samantha Bova, auteure principale de l’étude. « Le réchauffement de la fin de l’Holocène a en effet été causé par l’augmentation des gaz à effet de serre, comme prévu par les modèles climatiques, et cela élimine tout doute sur le rôle-clé du dioxyde de carbone dans le réchauffement climatique » ajoute-t-elle.

Réconcilier observations et modélisations numériques
Ces résultats permettent de résoudre le désaccord qui persistait jusqu’à présent entre les reconstructions reposant sur les prélèvements de terrain et les simulations numériques. En effet, lorsque les modèles simulent le climat de l’Holocène, ils tendent à produire une Terre moins chaude que ce que montrent les séries paléoclimatiques. Et pour cause, les proxys utilisés pour produire ces dernières donnent surtout une indication sur la température d’été. Autrement dit, les valeurs ne sont pas représentatives de la moyenne annuelle contrairement à ce qui était assumé.
La méthode développée par les scientifiques permet de réajuster ces valeurs saisonnières vers des valeurs annuelles. Elle repose sur de nouveaux carottages de sédiments marins effectués au nord de la Papouasie-Nouvelle-Guinée. Les coquilles calcaires de foraminifères contenues dans les prélèvements ont permis de remonter aux températures de l’Holocène mais également du précédent interglaciaire il y a 128 000 à 115 000 ans. Lorsque ce réajustement est fait, le maximum thermique de l’Holocène n’apparaît plus.
« L’apparente divergence entre les modèles climatiques et les données a jeté des doutes parmi les sceptiques sur le rôle des gaz à effet de serre dans le changement climatique pendant l’Holocène et peut-être dans le futur » note Yair Rosenthal, coauteur de l’étude. « Nos reconstructions démontrent que la température mondiale annuelle actuelle a dépassé les niveaux des 12 000 dernières années et se rapproche probablement de la chaleur de la dernière période interglaciaire – il y a 128 000 à 115 000 ans » rapporte, non sans une certaine gravité, le papier.