Diagnostiquer une démence n’est pas seulement une affaire de mémoire qui flanche. C’est une enquête complexe qui mobilise des batteries de tests, des spécialistes expérimentés, des semaines d’attente et, parfois, des incertitudes. Et si un outil d’intelligence artificielle permettait enfin de poser rapidement et précisément un diagnostic, à partir d’un simple scanner cérébral ? C’est la promesse de StateViewer, un nouvel assistant médical développé par la Mayo Clinic, capable d’identifier neuf types de démences, dont la maladie d’Alzheimer, avec une précision de 88 %.
Une avancée cruciale face à une urgence mondiale
Avec plus de 55 millions de personnes concernées dans le monde, la démence est l’un des défis sanitaires majeurs du 21e siècle. Chaque année, près de 10 millions de nouveaux cas sont recensés, et la maladie d’Alzheimer reste la forme la plus répandue. C’est aujourd’hui la cinquième cause de décès dans le monde. Plus que jamais, la course au diagnostic précoce est lancée. Car mieux on identifie le type de démence, plus tôt on peut intervenir avec les traitements et les soins appropriés.
Une IA qui comprend les schémas du cerveau
C’est dans ce contexte que naît StateViewer, une IA conçue pour interpréter des tomographies cérébrales TEP-FDG, un type de scan qui révèle comment le cerveau consomme du glucose, un bon indicateur de l’activité neuronale. L’outil fonctionne en comparant les données d’un patient à une base de plus de 3 600 images cérébrales, collectées chez des personnes atteintes de diverses formes de démence ou en bonne santé cognitive.
Ce qui rend cette IA remarquable, ce n’est pas seulement sa précision, mais aussi sa vitesse et sa pédagogie. Là où un clinicien mettrait du temps à interpréter les résultats, l’outil délivre des cartes cérébrales en couleur, indiquant visuellement quelles zones du cerveau sont concernées et comment cela oriente le diagnostic. Même un médecin sans spécialisation neurologique peut comprendre et utiliser les résultats.
Alzheimer, corps de Lewy, démence frontotemporale… l’IA distingue les nuances
Diagnostiquer les démences est souvent un casse-tête. Les symptômes peuvent se chevaucher : troubles de la mémoire, du langage, du comportement, de l’attention… Pourtant, chaque type de démence attaque des zones cérébrales spécifiques. La maladie d’Alzheimer cible les régions liées à la mémoire. La démence à corps de Lewy affecte l’attention et les fonctions motrices. La démence frontotemporale modifie la parole et la personnalité. StateViewer permet de détecter ces signatures neurologiques distinctes en quelques secondes.

Derrière l’algorithme, des visages et des intentions
Le projet est piloté par le Dr David Jones, neurologue à la Mayo Clinic, et passionné par la complexité du cerveau humain. « Chaque patient est une énigme, et StateViewer est notre loupe numérique pour l’élucider », explique-t-il. À ses côtés, Leland Barnard, ingénieur spécialiste de l’IA, rappelle que derrière chaque scan se cache une vie bouleversée par l’attente d’un diagnostic. « Notre priorité a toujours été d’aider les médecins à répondre plus vite, plus précisément, avec plus d’humanité. »
Un outil pensé pour les cliniques de demain
StateViewer n’a pas vocation à remplacer les neurologues, mais à leur offrir un coéquipier numérique, surtout dans les hôpitaux ou cliniques manquant d’expertise spécialisée. En rendant l’interprétation des images plus accessible et plus fiable, l’IA devient un outil d’équité médicale, en élargissant l’accès à un diagnostic de qualité.
Et maintenant ? Vers une médecine personnalisée
L’équipe de la Mayo Clinic prévoit déjà d’étendre l’utilisation de StateViewer à d’autres contextes cliniques, d’élargir les bases de données, et peut-être, à terme, d’intégrer l’IA dans le suivi des traitements. Dans un futur proche, une personne présentant les premiers signes de confusion pourrait bénéficier d’un diagnostic précoce, local, rapide et fiable, grâce à un simple scanner – et à une IA entraînée à repérer ce que l’œil humain ne peut toujours voir.
