L’un des microbes les plus résistants de la Terre pourrait survivre près de la surface de Mars beaucoup plus longtemps qu’on ne le pensait auparavant, selon des recherches. Les résultats augmentent la probabilité que la vie microbienne puisse encore exister sur la planète rouge. Les détails de l’étude sont publiés dans la revue Astrobiology.
L’environnement martien est impitoyable. Les conditions y sont très sèches et glaciales (-63°C) aux latitudes moyennes, tandis que la surface est constamment bombardée de rayonnements cosmiques et solaires. Pour déterminer si la vie pourrait ou non survivre à de telles conditions, une équipe dirigée par Michael Daly, de l’Uniformed Services University of the Health Sciences (Maryland), a d’abord cherché à déterminer les limites de survie de la vie microbienne aux rayonnements ionisants.
Dans le cadre de ces travaux, les chercheurs ont testé une demi-douzaine de microbes et de champignons – tous « extrêmophiles » – pour voir combien de temps ces derniers pourraient survivre dans un environnement simulant les latitudes moyennes de Mars (températures, lumière ultraviolette, rayons gamma, etc).
Les chercheurs ont ensuite mesuré la quantité d’antioxydants de manganèse accumulés dans les cellules desdits microbes. Les antioxydants de manganèse se forment à la suite d’une exposition aux radiations. En résumé, plus ils se forment, plus les organismes peuvent résister aux radiations.
Conan la bactérie
L’un de ces microbes est sorti du lot : Deinococcus radiodurans, aussi appelée Conan la bactérie. Il s’agit de l’un des organismes les plus résistants au monde. Radiations ionisantes, vide sidéral, acide, UV, dessèchement, faim ou encore températures extrêmes, cette bactérie s’adapte en toutes circonstances, ou presque. Elle fut découverte en 1956 par un chercheur américain qui tentait de stériliser des boîtes de corned-beef en les soumettant à des rayons gamma. À sa grande surprise, des colonies de Deinococcus radiodurans avaient survécu.
Les chercheurs ont découvert que Conan la bactérie pouvait absorber jusqu’à 28 000 fois plus de radiations que ce à quoi un humain peut survivre. Cette mesure a permis à l’équipe de Daly d’estimer combien de temps le microbe pourrait survivre à différentes profondeurs sur Mars.
Des expériences précédentes, dans lesquelles Conan la bactérie avait été suspendue dans de l’eau soumise à des radiations comme celles trouvées sur Mars, avaient indiqué que le microbe pouvait survivre sous la surface de Mars pendant 1,2 million d’années. Ces expériences ont montré qu’une telle bactérie pourrait en réalité survivre à environ dix mètres sous la surface de Mars pendant 280 millions d’années.
Notez que cette durée de vie serait réduite à 1,5 million d’années si elle était enterrée à seulement dix centimètres sous la surface, et à quelques heures seulement en surface.
En mode « survie » malgré tout
Il y a entre 3,5 et 4 milliards d’années, l’environnement de Mars était relativement similaire à celui de la Terre. Désormais, les conditions de vie y sont infernales. L’équipe reconnaît cette complication, mais pense qu’une vie microbienne aurait pu s’adapter malgré tout.
« Bien que les Deinococcus radiodurans enterrés dans le sous-sol martien n’aient pas pu survivre en dormance pendant les 2 à 2,5 milliards d’années estimées depuis la disparition de l’eau courante sur Mars, ces environnements martiens sont régulièrement altérés et fondus par les impacts de météorites« , peut-on lire dans un communiqué. « Nous suggérons que la fonte périodique pourrait permettre un repeuplement et une dispersion intermittents.«
Pour sonder la présence de cette vie potentielle, les chercheurs préconisent de concentrer les travaux sur les grands cratères de moins de 280 millions d’années.
Le cratère Gale, sur lequel évolue Curiosity, est beaucoup plus ancien, formé il y a environ 3,8 milliards d’années. Le cratère Jezero Crater, qui supporte le rover Perseverance, est probablement aussi ancien. Cependant, il existe des cratère plus jeunes. Tooting Crater, par exemple, n’aurait que des centaines de milliers d’années seulement. Situé dans Amazonis Planitia, à l’ouest d’Olympus Mons, il mesure vingt-huit kilomètres de large.