Une émanation massive de méthane depuis le fond marin a été identifiée par des chercheurs

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Crédits : Pixabay.

Il y a peu, des scientifiques découvraient l’existence d’une fuite de méthane (CH4) active à proximité des côtes antarctiques. C’était la première fois qu’un tel phénomène était officiellement observé dans cette région du monde. Dans une nouvelle étude publiée par la revue Nature climate change, des chercheurs de l’Université de Linnaeus (Suède) ont désormais rapporté un fait encore plus troublant.

En effet, ils ont constaté la présence d’un déstockage massif de méthane depuis le plancher océanique en direction de l’océan au sud-ouest de l’Atlantique. Plus précisément, à proximité des côtes brésiliennes. En cause, la déstabilisation d’hydrates de méthane situés au niveau du talus continental. Ces hydrates – ou clathrates – sont des formations solides analogues à de la glace et qui emprisonnent des molécules de CH4. Aussi, on ne les trouve que là où la température océanique est assez basse et la pression hydrostatique assez forte.

« On estime qu’il y a plus de carbone organique sous forme de méthane dans les hydrates que dans tous les combustibles fossiles réunis » souligne Marcelo Ketzer, auteur principal du papier. « L’émanation de méthane pourrait conduire à une boucle de rétroaction dans laquelle le réchauffement des océans fait fondre les hydrates, entraînant le rejet de méthane depuis le fond de l’océan dans l’eau. Plus il fait chaud, plus de méthane s’échappe… ». Un processus qui risque de s’emballer d’autant plus franchement que le climat s’est modifié.

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Représentation schématique de la situation. Le talus continental (seafloor) et la zone de dissolution des hydrates (en bleu) sont notamment indiqués. Les émanations sont représentées par des petites cheminées bleu foncé. Le niveau de la mer est représenté par la ligne bleu clair (Sea-level). Crédits : Marcelo Ketzer & al. 2020.

Méthane : une oxydation plus faible qu’attendu

Ces résultats ont été obtenus grâce à l’analyse détaillée de plusieurs carottes sédimentaires prélevées entre 2011 et 2014. C’est la première fois qu’un tel processus est rapporté dans l’hémisphère sud. Quant à l’hémisphère nord, des situations analogues sont connues pour exister près des eaux peu profondes du bassin arctique. « Nous continuons maintenant à travailler avec ces données et résultats afin d’obtenir une meilleure compréhension de la quantité de méthane présente dans la région étudiée et de la quantité qui pourrait être rejetée par la dissociation des hydrates de gaz dans l’océan à l’avenir » ajoute le scientifique.

Un des points importants mis en exergue par cette découverte est le suivant. Une fraction notable du méthane qui s’échappe du lit sédimentaire n’est pas oxydé par des micro-organismes méthanotrophes. Et ce, contrairement à ce que l’on pouvait penser jusqu’à présent. Autrement dit, ce gaz à effet de serre 25 fois plus puissant que le CO2 diffuserait vers l’intérieur de l’océan plus facilement que prévu. Néanmoins, les observations montrent que, pour l’instant, ces bulles de méthane se dissolvent dans l’eau avant de pouvoir atteindre l’atmosphère.

Vue 3D du plancher océanique dans la zone d’étude. Crédits : Marcelo Ketzer & al. 2020.

« La dissociation des hydrates et les fuites de méthane associées dans nos océans sont un processus de long terme qui peut durer plusieurs siècles. Elles peuvent conduire à une amplification significative du changement climatique et à des modifications dans la chimie des océans – par exemple sous forme d’une acidification supplémentaire » explique Marcelo Ketzer. Le méthane oxydé est en effet transformé en CO2. Dissous dans l’eau, ce dernier forme de l’acide carbonique qui diminue le pH des océans – et donc augmente leur acidité.

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