La Voie lactée cache-t-elle une armée invisible de trous noirs ? Si nous connaissons bien les petits trous noirs formés par l’effondrement d’étoiles massives et le géant Sagittarius A* tapi au centre de notre galaxie, une catégorie entière reste introuvable : les trous noirs de masse intermédiaire, ou IMBH (Intermediate-Mass Black Holes). Mais selon une nouvelle étude suisse, ils pourraient être bien plus proches que nous ne le pensions… juste invisibles et errants dans notre propre galaxie.
Le chaînon manquant du bestiaire cosmique
En astronomie, la taille compte. D’un côté, les trous noirs stellaires de quelques dizaines à centaines de masses solaires sont bien documentés. De l’autre, les trous noirs supermassifs comme Sagittarius A*, au centre de la Voie lactée, atteignent des millions de masses solaires. Mais entre les deux ? C’est le grand vide observationnel.
Les IMBH sont censés peser entre 10 000 et 100 000 fois la masse du Soleil, mais leur existence reste hypothétique. Pourtant, leur rôle pourrait être crucial : ils pourraient être les briques fondatrices des monstres supermassifs que l’on observe au cœur des galaxies.
Une galaxie cannibale… et ses restes invisibles
La Voie lactée ne s’est pas formée seule : au fil de milliards d’années, elle a avalé des dizaines de galaxies naines, absorbant leurs étoiles… mais aussi leurs trous noirs. On supposait jusqu’ici que les trous noirs de ces galaxies naines finissaient par tomber vers le centre galactique pour fusionner avec Sagittarius A*.
Mais une étude récente menée par l’Université de Zurich, acceptée pour publication dans la revue Monthly Notices of the Royal Astronomical Society, remet en question ce scénario. En utilisant des simulations cosmologiques haute résolution, les chercheurs ont modélisé l’évolution d’une galaxie semblable à la nôtre. Résultat ? Entre 5 et 18 trous noirs de masse intermédiaire pourraient rôder dans le disque galactique, hors du centre, là où personne ne les attendait.
Des fantômes impossibles à voir… pour l’instant
Pourquoi ne les a-t-on jamais détectés ? Parce que ces objets sont des fantômes cosmiques : ils n’émettent pas de lumière, et s’ils n’interagissent pas activement avec une étoile ou une grande quantité de matière, ils sont indétectables par les méthodes traditionnelles.
Même les télescopes les plus sensibles ne peuvent repérer que les effets gravitationnels qu’ils exercent sur leur environnement — ce qui, dans le cas d’objets isolés flottant dans l’espace interstellaire, est infime. Pire encore, on ne sait ni où chercher, ni quels indices précis guetter.

Une piste pour le futur
Mais tout espoir n’est pas perdu. La mission Gaia, qui cartographie avec une précision extrême le mouvement de plus d’un milliard d’étoiles, pourrait détecter de subtiles perturbations gravitationnelles révélant la présence de ces intrus invisibles. Et les futurs observatoires d’ondes gravitationnelles comme LISA (Laser Interferometer Space Antenna) pourraient également capteur les fusions rares impliquant ces objets énigmatiques.
Une révolution en attente
La confirmation de l’existence de ces trous noirs errants changerait la donne : cela renforcerait le scénario selon lequel les trous noirs supermassifs croissent en fusionnant avec des IMBH, tout en apportant un éclairage inédit sur l’histoire de notre galaxie et de ses collisions passées.
Mais pour l’instant, ces voyageurs noirs sans adresse fixe restent hors de notre portée. Et c’est justement ce qui les rend si fascinants.
En résumé
La Voie lactée pourrait abriter entre 5 et 18 trous noirs de masse intermédiaire.
Ces objets proviendraient de galaxies naines cannibalisées.
Aucun n’a été observé directement : ils errent dans le disque galactique, loin du centre.
Leur détection changerait notre compréhension de l’évolution galactique.
Les futures missions comme Gaia et LISA pourraient lever le voile sur ces entités invisibles.