Invisible aux yeux de la science jusqu’à récemment, un insecte-bâton colossal vient d’être découvert dans les hauteurs tropicales du nord de l’Australie. Mesurant près de 40 centimètres et affichant un poids record pour un insecte australien, cette espèce nouvellement identifiée fascine les biologistes par sa taille inhabituelle et son habitat reculé. Dévoilé dans une étude scientifique publiée en juin 2025, ce géant discret pourrait bien bouleverser notre compréhension de l’évolution des insectes dans les environnements extrêmes.
Une nouvelle espèce hors normes
Le monde scientifique a officiellement accueilli Acrophylla alta, une espèce d’insecte-bâton récemment décrite dans la revue Zootaxa. Cet arthropode se distingue par sa morphologie imposante : environ 40 cm de long pour un poids de 44 grammes, ce qui en fait l’insecte le plus lourd jamais répertorié en Australie. Bien qu’il ne soit pas le plus long phasme du pays (un titre qui revient à Ctenomorpha gargantua, capable d’atteindre 57 cm), A. alta se distingue par une masse corporelle beaucoup plus importante.
La découverte de cet insecte est le fruit d’un travail de terrain réalisé dans une zone difficilement accessible : les Tablelands du nord du Queensland, une région montagneuse couverte de forêt tropicale, entre 500 et 1200 mètres d’altitude. Les chercheurs, menés par Angus Emmott de l’Université James Cook, ont qualifié cette nouvelle espèce de « spectaculaire », tant par ses dimensions que par son mode de vie discret.
Une vie dans les hauteurs, loin des regards
L’un des mystères entourant Acrophylla alta réside dans le fait qu’aucun scientifique ne l’avait identifié jusqu’à présent, malgré la longue tradition d’étude des insectes en Australie. La raison principale : cet insecte évolue dans la canopée, le sommet de la forêt, un écosystème souvent hors de portée des observations habituelles. Seuls des événements exceptionnels comme des tempêtes, ou une rencontre fortuite avec un prédateur, semblent pouvoir ramener ces spécimens à hauteur d’humain.
Cette stratégie de discrétion, combinée à l’isolement géographique de son habitat, explique pourquoi cette espèce est restée dans l’ombre si longtemps. De plus, son régime alimentaire composé de feuilles de canopée n’incite pas l’insecte à descendre au sol, réduisant d’autant les chances de croiser sa route.
A new species of stick insect weighing around the same as a golf ball has been discovered in the canopies of a remote rainforest in Australia’s northeast, an Australian university announced on Thursday.
Scientists believe the winged insect, Acrophylla alta, is the heaviest ever… pic.twitter.com/kacIxGOXNY
— CBS News (@CBSNews) July 31, 2025
Une adaptation aux conditions extrêmes ?
Pourquoi une telle taille chez un insecte ? Les scientifiques avancent une hypothèse intéressante liée aux conditions climatiques de son habitat. Le nord du Queensland, bien qu’en région tropicale, présente des températures plus fraîches en altitude, notamment dans les zones boisées où évolue A. alta. Cette particularité pourrait expliquer la grande masse corporelle de l’espèce.
Selon la règle de Bergmann, une théorie bien connue en biologie évolutive, les animaux vivant dans des climats plus froids tendent à être plus grands. Cela leur permet de conserver plus facilement la chaleur, grâce à un rapport surface/volume plus faible. Si cette règle est fréquemment vérifiée chez les mammifères et les oiseaux, son application aux insectes est encore débattue. Pourtant, dans le cas de A. alta, cette tendance pourrait bel et bien s’appliquer.
Le corps massif de cet insecte serait donc une réponse évolutive à un environnement plus rigoureux, où la chaleur se fait plus rare et la survie exige des adaptations spécifiques.
Un symbole de la biodiversité cachée
La découverte de Acrophylla alta rappelle à quel point la biodiversité terrestre reste en grande partie méconnue, y compris dans des pays aussi étudiés que l’Australie. Les canopées des forêts tropicales, souvent inaccessibles, abritent des écosystèmes uniques, où évoluent encore des espèces que la science n’a jamais décrites.
Cette trouvaille pourrait relancer l’intérêt pour les explorations en hauteur, dans l’un des derniers grands « fronts vierges » de la biologie terrestre. Elle souligne également l’importance de préserver ces habitats forestiers fragiles, menacés par les changements climatiques et les pressions humaines.
