Un Arctique plus chaud rend-il les situations météo plus persistantes à nos latitudes ?

Crédits : NASA.

Au cours des dernières décennies, l’écart de température entre l’Arctique et les moyennes latitudes s’est réduit. Une conséquence du réchauffement climatique qui, selon certains scientifiques, amènerait des configurations météorologiques plus persistantes – et donc extrêmes – à nos latitudes. Mais les observations soutiennent-elles réellement ce paradigme ?

Le réchauffement du globe n’est pas homogène. En effet, certains secteurs se réchauffent plus que d’autres. En particulier, la région arctique connaît une hausse de température deux à trois fois plus rapide que la moyenne mondiale. Cette signature très caractérisée porte le nom d’amplification arctique.

Amplification arctique et déplacement des systèmes météorologiques

Une hypothèse avance qu’un réchauffement plus marqué au nord qu’au sud amène les dépressions et anticyclones des moyennes latitudes à se déplacer moins rapidement vers l’est. Or, un mouvement de translation plus lent est généralement associé à des situations météorologiques extrêmes. Citons parmi d’autres les canicules, les sécheresses ou encore les vagues de froid.

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Anomalie de température à 2 mètres le 20 décembre 2016. Crédits : Climate reanalyser.

Toutefois, le cheminement physique reliant la diminution du gradient thermique nord-sud au ralentissement évoqué n’est pas clairement établi. Il est donc difficile de dire si l’hypothèse est valide et, le cas échéant, si elle correspond à des modifications notables.

Dans une étude parue dans la revue Geophysical Research Letters, des chercheurs du Laboratoire de météorologie dynamique se sont penchés sur la question. L’objectif ? Rechercher dans les séries observationnelles un éventuel ralentissement dans le déplacement des systèmes météorologiques de moyennes latitudes.

Pas de tendances significatives

Pour accomplir cette tâche ardue – car demandant d’identifier précisément des systèmes d’ondes complexes -, les scientifiques ont développé une sorte de compteur de vitesse faisant appel à l’analyse spectrale. Les résultats obtenus sur la période s’étendant de 1979 à 2018 révèlent deux points majeurs. D’un côté, ils confirment le lien entre les évènements météorologiques extrêmes et un déplacement plus lent des dépressions et anticyclones. De l’autre, ils montrent que si la vitesse de déplacement fluctue beaucoup, elle ne présente pas de tendances significatives à long terme. Et ce, aussi bien en été qu’en hiver.

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Vitesse de déplacement (en m/s) des systèmes météorologiques entre 1979 et 2018. Les points colorés représentent les moyennes saisonnières en hiver (bleu) et en été (rouge). Notez l’absence de tendances significatives. Crédits : Jacopo Riboldi & al. 2020.

« L’amplification arctique n’a pas joué un rôle décisif dans la modulation de variabilité de la vitesse de phase au cours des dernières décennies », indique ainsi l’étude dans son abstract. Un résultat qui doit nous « rappeler que la prudence est de mise lorsque l’on attribue des conditions météorologiques extrêmes récentes à une stagnation accrue des méandres du courant-jet ».

En résumé, malgré la réduction du gradient thermique nord-sud, on ne constate pas de ralentissement dans la propagation vers l’est des hautes et basses pressions. Aussi, l’hypothèse exposée plus haut ne semble pas tenir face aux observations. Un point qui appelle à développer une meilleure compréhension des processus fins contrôlant la dynamique atmosphérique des moyennes latitudes.

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