Un astéroïde traînant dans le sillage gravitationnel de Mars vient d’être analysé par une équipe d’astronomes. Son examen spectral révèle une ressemblance surprenante avec la Lune, soulevant des questions sur les origines de l’objet. Les détails de l’étude sont publiés dans la revue Icarus.
En astronomie, un troyen est un objet dont l’orbite héliocentrique est en résonance de moyen mouvement 1:1 avec celle d’une planète, et qui est situé près de l’un des deux points stables de Lagrange (L4 ou L5) du couple Soleil-planète. Grossièrement, imaginez de petits astéroïdes positionnés à 60 degrés devant et derrière leur planète.
On recense aujourd’hui 8 619 troyens dans le système solaire, dont la très grande majorité (8 580 troyens) fréquente l’environnement de Jupiter. Le reste est réparti entre les autres planètes. Mars, elle, en dénombre moins d’une dizaine.
Ceci dit, les objets qui suivent la planète rouge (placés derrière, donc) sont appelés « troyens martiens L5 ». Jusqu’à présent, nous pensions que tous appartenaient à la « famille Eureka », composée de 5261 Eureka – le premier troyen martien découvert – et d’un tas de petits fragments probablement détachés de ce corps parent. Or, il semblerait que l’un des astéroïdes – appelé (101429) 1998 VF31 – soit différent.
Un fragment de Lune ?
Dans le cadre d’une étude, des astronomes de l’Observatoire et planétarium d’Armagh (Irlande du Nord) ont examiné ces troyens martiens L5 avec le spectrographe X-SHOOTER, installé sur Very Large Telescope (VLT), au Chili. L’équipe a précisément examiné la manière dont la lumière du Soleil se reflète sur ces objets. Il est finalement ressorti que l’astéroïde 1998 VF31 affichait une correspondance spectrale avec un objet beaucoup plus proche de chez nous : la Lune.
Autrement dit, d’après les chercheurs de cette étude, il est possible que cet astéroïde soit un «fragment de la croûte solide originale de notre satellite». Si tel est le cas, comment « ce jumeau » perdu depuis longtemps pourrait s’être retrouvé dans le sillon de la planète Mars ? Il est pour l’heure difficile de répondre à cette question.
L’astronome Apostolos Christou, principal auteur de ces travaux, rappelle tout de même que le premier système solaire était, il y a plusieurs milliards d’années, un endroit très différent d’aujourd’hui. «L’espace entre les planètes nouvellement formées était rempli de débris et les collisions étaient monnaie courante», explique-t-il. «De gros astéroïdes [planétésimaux] frappaient constamment la Lune et les autres planètes. Un éclat d’une telle collision aurait alors pu atteindre l’orbite martienne alors que la planète était toujours en formation».
Il est également possible, avance le chercheur, que ce troyen ne soit finalement qu’un simple fragment de Mars qui, par des processus d’altération du rayonnement solaire, a fini par ressembler à la Lune. Pour l’heure, la question reste donc ouverte. D’autres observations avec des spectrographes encore plus puissants pourraient être en mesure de nous éclairer davantage.