trous noirs
Crédits : NASA

Deux étranges trous noirs découverts près de la Terre

En s’appuyant sur les données de la mission européenne Gaia, une équipe d’astronomes annonce avoir identifié deux trous noirs dans l’arrière-cour cosmique de la Terre qui pourraient représenter une catégorie jusque-là inconnue d’objets mystérieux et massifs. Les détails de l’étude sont publiés dans les Avis mensuels de la Royal Astronomical Society.

Un record de proximité avec la Terre

Quand on parle de trou noir, on évoque souvent l’objet supermassif situé au centre de notre galaxie. Connu sous le nom de Sagittaire A*, vous retrouverez cet ogre cosmique de plus de quatre millions de masses solaires à environ 26 000 années-lumière de la Terre. Cependant, ce n’est pas le seul trou noir de la Voie lactée. Dans le cadre d’une étude, des chercheurs en ont d’ailleurs identifié deux particulièrement discrets. Surnommés Gaia BH1 et Gaia BH2, ces deux trous noirs sont les plus proches de la Terre jamais découverts à ce jour selon l’ESA.

Gaia BH1 se positionne à seulement 1 560 années-lumière du Soleil en direction de la Constellation d’Ophiuchus. À titre de comparaison, c’est pratiquement trois fois plus proche que le précédent détenteur du record. Gaia BH2 se trouve quant à lui à environ 3 800 années-lumière de la Terre, vers la constellation du Centaure. Ces deux objets sont environ neuf à dix fois plus massifs que notre Soleil.

Des objets « dormants »

S’il a fallu si longtemps aux astronomes pour identifier la présence de ces trous noirs, c’est parce qu’ils sont pratiquement invisibles. La présence d’un trou noir ne peut en effet pas être directement observée, car ces objets n’émettent pas de lumière ou de rayonnement. Cependant, leurs effets gravitationnels sur les objets environnants peuvent être détectés. Les astronomes s’appuient notamment sur l’observation des jets de matière : les trous noirs au centre des galaxies peuvent éjecter de la matière à haute vitesse, créant ainsi des jets de matière visibles dans le spectre radio. Lorsqu’un trou noir attire de la matière de son environnement, cette matière forme également un disque d’accrétion qui peut produire des émissions lumineuses visibles dans diverses longueurs d’onde, telles que les rayons X.

Ici, contrairement aux découvertes précédentes, Gaia BH1 et 2 sont complètement sombres. Autrement dit, ils sont « dormants » (ou inactifs). Pour les repérer, les chercheurs se sont appuyés sur l’observation des mouvements de deux étoiles compagnes semblables au Soleil en orbite autour de ces géants cosmiques.

Dans les données de l’observatoire Gaia, de l’agence spatiale européenne, ces deux étoiles affichaient une légère oscillation au cours de leur voyage dans l’espace, indiquant la présence d’objets massifs à proximité. S’agissait-il d’autres étoiles ? En analysant ces deux portions du ciel avec des télescopes au sol, les astronomes n’ont déniché aucun objet émettant des radiations. Selon les calculs, ces mouvements n’avaient alors de sens que si des trous noirs étaient impliqués.

trous noirs Gaia 1 Gaia 2
Source: DR
Une carte de la galaxie révélant les emplacements des trous noirs proches Gaia BH1 et BH2. Crédits : ESA/Gaia/DPAC

Un nouveau type de trou noir ?

Cette étude suggère que contrairement aux binaires à rayons X (des paires étoile-trou noir qui orbitent étroitement ensemble et émettent un signal X révélateur), Gaia BH1 et Gaia BH2 représentent probablement une nouvelle catégorie de trous noirs jamais vus auparavant. « Ce qui distingue ce nouveau groupe de trous noirs de ceux que nous connaissions déjà, c’est leur large séparation d’avec leurs étoiles compagnes« , précise Kareem El-Badry, astrophysicien du Harvard-Smithsonian Center for Astrophysics. Il ajoute que ces trous noirs dormants « ont probablement une histoire de formation complètement différente de celle des binaires à rayons X« .

Les astronomes espèrent que la prochaine publication de données de Gaia, prévue pour 2025, permettra la découverte de trous noirs dormants similaires. Plus nous aurons d’échantillons à analyser, plus nous serons en mesure d’éclairer les mystères de leur formation et de leur évolution.

Brice Louvet

Rédigé par Brice Louvet

Brice est un journaliste passionné de sciences. Ses domaines favoris : l'espace et la paléontologie. Il collabore avec Sciencepost depuis près d'une décennie, partageant avec vous les nouvelles découvertes et les dossiers les plus intéressants.