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En Antarctique, le tourisme contribue à accélérer la fonte des glaces

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Crédits : Pixabay.

De nouveaux travaux publiés dans la revue Nature Communications le 22 février dernier montrent comment l’afflux croissant de touristes en Antarctique conduit à augmenter le rythme de fonte à proximité des sites les plus visités de la péninsule.

La dimension exotique, vierge et immaculée du paysage antarctique en fait un lieu de plus en plus prisé par les touristes. Avec ses conditions de froid extrême et ses gigantesques calottes polaires, le continent blanc nous semble en retrait par rapport au reste de la planète, une impression qui trouve un écho fort dans la réalité. En effet, le courant océanique circumpolaire et les vigoureux vents d’ouest qui encerclent l’Antarctique participent à l’isoler de nombreuses influences extérieures.

Un assombrissement des glaces par les dépôts de suie

L’afflux croissant de touristes vers les côtes antarctiques n’est cependant pas sans conséquence. La pollution y augmente à grande vitesse avec des impacts toujours plus importants sur l’environnement local et le taux de fonte des glaces. Contrairement à ce que l’on pourrait penser, le problème ne se trouve pas tant dans la production de déchets, car le traité sur l’Antarctique oblige les autorités compétentes à les évacuer du continent, mais dans l’émission de microscopiques poussières.

Dans une nouvelle étude, un groupe de chercheurs a quantifié l’impact qu’avait le tourisme sur l’environnement régional. En s’appuyant sur une vingtaine d’échantillons de glace prélevés en périphérie du domaine le plus visité de l’Antarctique, les scientifiques ont constaté une quantité anormalement élevée de particules de suie, aussi appelée noir de carbone. Or, en assombrissant la surface, ces poussières augmentent l’absorption d’énergie solaire et donc l’ampleur du dégel lors de l’été austral.

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Pertes de glaces additionnelles (en tonnes par personne) pour les touristes (bleu) et les chercheurs (rouge). Les courbes représentent les distributions statistiques correspondantes. Crédits : Raúl R. Cordero & coll. 2022.

Les visiteurs comme les chercheurs contribuent à accélérer la fonte en Antarctique

Émises en grande partie par les navires qui amènent les touristes jusqu’aux côtes, ces particules de pollution ont contribué à une fonte additionnelle équivalant à 83 tonnes de glace par visiteur entre 2016 et 2020. Ce chiffre est jusqu’à dix fois plus élevé pour les chercheurs présents sur le continent tout au long de l’année et qui usent de nombreux appareils émetteurs de suie. En effet, outre les 74 000 touristes recensés lors de la saison 2019-2020, quelques milliers de scientifiques répartis sur soixante-dix sites de recherche œuvrent sur le terrain.

Pour limiter les dépôts de suie et leurs effets délétères, le recours à des énergies peu ou pas carbonées est une piste prometteuse sur laquelle des progrès considérables ont été accomplis ces dernières années. « Néanmoins, nos résultats montrent qu’il reste encore beaucoup à faire pour réduire les impacts du tourisme et des navires en Antarctique. Sinon, les dépôts de suie attribuables au tourisme augmenteront à mesure que la présence humaine en Antarctique augmentera », souligne l’étude dans sa conclusion.

Damien Altendorf

Rédigé par Damien Altendorf

Habitant du Nord-est de la France, je suis avant tout un grand passionné de météorologie et de climatologie. Initialement rédacteur pour le site "Monsieur Météo", je contribue désormais à alimenter celui de "Sciencepost".