Des tissus musculaires ont été créés à partir de cellules souches

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Une équipe d’ingénieurs biomédicaux affirme avoir développé le premier muscle squelettique humain fonctionnant à partir de cellules souches pluripotentes induites.

Des ingénieurs biomédicaux de l’Université de Duke expliquent avoir créé le premier muscle squelettique humain fonctionnant à partir de cellules souches pluripotentes, capables de produire n’importe quelle forme de cellule ou de tissu corporel. Publiée le 9 janvier dans Nature Communications, cette étude s’appuie notamment sur les travaux de cette même université menés en 2015. Les chercheurs avaient alors été en mesure de développer un tissu musculaire humain à partir de cellules extraites dans des biopsies musculaires. Utiliser des tissus non musculaires permettra ici aux scientifiques de développer plus de cellules musculaires, et d’entrevoir de nouveaux traitements pour les maladies musculaires rares.

« En commençant par les cellules souches pluripotentes qui ne sont pas des cellules musculaires, mais qui peuvent devenir toutes les cellules existantes dans notre corps, nous pouvons développer un nombre illimité de cellules progénitrices myogéniques », note Nenad Bursac, professeur d’ingénierie biomédicale à l’Université Duke. « Ces cellules progénitrices ressemblent à des cellules souches musculaires adultes appelées “cellules satellites”, qui peuvent théoriquement développer un muscle entier à partir d’une seule cellule ».

Pour les travaux menés en 2015, les chercheurs avaient commencé avec de petits échantillons de cellules humaines obtenues à partir de biopsies musculaires, appelées myoblastes, qui avaient déjà dépassé le stade des cellules souches mais n’étaient pas encore devenues des fibres musculaires matures. Ils avaient alors multiplié ces myoblastes avant de les placer dans un échafaudage tridimensionnel de soutien rempli d’un gel nourrissant qui leur a permis de former des fibres musculaires humaines alignées et fonctionnelles.

Pour cette nouvelle étude, les chercheurs se sont cette fois-ci appuyés sur des cellules souches pluripotentes induites humaines. Il s’agit ici de cellules prélevées sur des tissus non musculaires adultes, tels que la peau ou le sang, et reprogrammées pour revenir à un état primordial. Les cellules souches pluripotentes sont ensuite cultivées en étant inondées avec une molécule appelée Pax7 – qui signale aux cellules de commencer à devenir musculaires. Au fur et à mesure de la prolifération des cellules, elles sont alors devenues très similaires aux cellules souches musculaires adultes. Bien que des études antérieures aient accompli cet exploit, personne n’a été capable de faire croître ces cellules intermédiaires en un muscle squelettique fonctionnel.

Cellule musculaire reconstituée par l’équipe du professeur Nenad Bursac.
Crédits : Duke University

Ainsi ces chercheurs ont réussi là où les tentatives précédentes avaient échoué. L’étude signale également qu’après deux à quatre semaines de culture, les cellules musculaires résultantes forment des fibres musculaires qui se contractent et réagissent à des stimuli externes, tels que des impulsions électriques et des signaux biochimiques imitant les entrées neuronales. Ils ont également implanté les fibres musculaires nouvellement développées dans des souris adultes et ont montré qu’elles pouvaient survivre et fonctionner pendant au moins trois semaines, tout en s’intégrant progressivement dans le tissu natif par vascularisation.

Cependant le muscle résultant n’est pas aussi fort que le tissu musculaire natif, et se présente également en deçà du muscle développé dans l’étude précédente s’appuyant sur des biopsies musculaires. Les fibres musculaires dérivées des cellules souches pluripotentes développent néanmoins des réservoirs de « cellules semblables à des satellites » qui sont nécessaires aux muscles adultes normaux pour réparer les dommages, alors que le muscle de l’étude précédente avait beaucoup moins de ces cellules. La méthode des cellules souches est également capable de faire croître beaucoup plus de cellules à partir d’un lot de départ plus petit que la méthode nécessitant la biopsie.

Ainsi ces deux avantages pointent vers la possibilité d’utiliser cette nouvelle méthode pour des thérapies régénératives et pour recréer des modèles de maladies rares. « La perspective d’étudier les maladies rares est particulièrement excitante », note l’un des chercheurs. « Lorsque vous avez un enfant qui souffre de dystrophie musculaire de Duchenne, il n’est pas très éthique de prélever des échantillons de muscle et de faire d’autres dommages, mais avec cette technique, nous pouvons prendre un petit échantillon de tissu non musculaire, comme la peau, transformer ces cellules et éventuellement développer une quantité infinie de fibres musculaires fonctionnelles pour les tests ».

La technique est également compatible pour être combinée avec des thérapies génétiques. Les chercheurs pourraient – en théorie – corriger les dysfonctionnements génétiques dans les cellules souches pluripotentes induites dérivées d’un patient, et ensuite développer des petits morceaux de muscles complètement sains. Bien que cela ne puisse ni guérir ni remplacer la masse musculaire totale d’un corps entier, elle pourrait être utilisée en tandem avec des thérapies génétiques plus largement ciblées, ou pour soigner des problèmes plus localisés.

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