Le tigre de Tasmanie semblait déjà bien affaibli bien avant que l’Homme ne commence à le chasser, considéré comme une menace pour le bétail. C’est en tout cas ce que suggère le séquençage génétique de l’animal.
Le thylacine, marsupial carnivore disparu de l’Australie, a longtemps été considéré comme un symbole tragique du manque d’attention de l’humanité pour les autres créatures qui partagent notre monde, la chasse excessive étant considérée comme la principale cause de sa disparition. Des chercheurs ont aujourd’hui séquencé le génome de l’animal, et nous avons enfin quelques réponses sur le dernier membre survivant de la famille des Thylacinidae — des animaux qui parcouraient la Terre depuis des dizaines de millions d’années.
Également connu sous le nom de tigre de Tasmanie, Thylacinus cynocephalus s’est éteint en Australie continentale il y a environ 3 000 ans. Un déclin attribué, peut-être à tort, à la concurrence d’un prédateur concurrent, le dingo. Mais, en Tasmanie, isolée par l’élévation du niveau de la mer il y a 14 000 ans, une population d’animaux a vécu jusqu’au 20e siècle. Considéré comme une menace pour le bétail, le gouvernement australien décida alors d’anéantir l’espèce. Elle fut déclarée éteinte en 1936. De ce fait, et suite à cet acharnement, on ne sait aujourd’hui pas grand-chose sur son comportement, ou son régime alimentaire, ou même sur sa propre lignée. Grâce au séquençage génétique, une équipe de chercheurs a finalement pu dresser un tableau plus précis de l’animal.
Des spécimens du thylacine ont en effet été conservés avant sa disparition. Des chercheurs australiens de l’Université d’Adélaïde et de l’Université de Melbourne se sont alors appuyés sur l’un d’entre eux, un bébé mort il y a 108 ans conservé dans un bocal, pour séquencer le génome du thylacine. « Le génome nous a permis de confirmer la place du thylacine dans l’arbre de l’évolution », note le chef de projet Andrew Pask, de l’Université de Melbourne. Le tigre de Tasmanie appartient aux Dasyuridae, une famille qui comprend le diable de Tasmanie, ou encore les souris marsupiales.
Cela confirme également que le tigre de Tasmanie est un produit de l’évolution convergente — lorsque deux animaux non apparentés développent des traits similaires pour s’adapter à des environnements similaires, ou pour remplir une niche écologique. Bien que ce marsupial présente une poche, comme les kangourous, le crâne de thylacine ressemble plus à celui d’un renard roux ou d’un loup gris que les crânes de ses plus proches parents. L’équipe a également pu en apprendre davantage sur le déclin de l’espèce. Depuis quelque temps, les scientifiques ont émis l’hypothèse que son extinction était en effet plus compliquée que supposée.
Le séquençage du génome a notamment révélé que la diversité génétique et la santé du thylacine étaient très faibles, peut-être en raison de leur isolement génétique en l’Australie continentale. Les résultats suggèrent également que, avant même son isolement, le thylacine était déjà en déclin génétique depuis au moins 70 000 ans, bien avant l’arrivée des premiers Hommes en Australie. Cela ne veut pas dire pur autant que l’humanité n’a pas eu son rôle à jouer dans son extinction. Les Hommes auraient alors « forcé la main » à une espèce déjà bien affaiblie. Sur la base de leur travail, l’équipe espère maintenant pouvoir aider un autre marsupial carnivore confronté à une situation similaire — le diable de Tasmanie.
Vous retrouverez tous les détails de cette étude dans la revue Nature Ecology and Evolution.
Source