Il y a peu, des chercheurs américains ont analysé les génomes de virus emprisonnés dans un glacier du plateau tibétain. Ces recherches montrent à quel point les populations de ce type de microbes ont changé ces dernières dizaines de milliers d’années. Or, ces changements sont probablement intervenus sous l’effet des variations climatiques de la Terre.
Une quantité phénoménale d’informations
Perché à plus de 6 000 mètres d’altitude, le glacier de Guliya se trouve sur le plateau tibétain (Chine). Comme l’explique une description publiée par le Byrd Polar and Climate Research Center de l’Université de l’Ohio (États-Unis), ce glacier ressemble à une calotte glaciaire polaire . Des murs de glace verticaux d’une hauteur de trente à quarante mètres encerclent la calotte qui présente des températures entre -15,6°C et -2,1°C, à respectivement dix mètres de profondeur et à sa base.
Dans la revue Nature Geoscience du 26 août 2024, les chercheurs du Byrd Polar and Climate Research Center ont indiqué avoir récupéré avec succès lors d’une expédition une carotte de glace de 308,6 mètres qui va jusqu’au substrat rocheux. L’objectif ? Analyser le matériel génétique des organismes microbiens qui vivaient par le passé dans la zone. Pas moins de 1 705 espèces virales ont fait l’objet d’une identification, les plus anciennes datant de 41 000 ans et les plus récentes de 160 ans.
Selon les auteurs, les informations dont il est ici question sont cinquante fois plus nombreuses que celles jamais obtenues auparavant en ce qui concerne les glaciers. Et pour cause, les trois quarts des espèces identifiées étaient encore inconnues jusqu’à aujourd’hui.
Vers une amélioration des modèles de prévision du climat
Il faut savoir que les humains n’ont rien à craindre des virus évoqués dans l’étude. En effet, ils infectent seulement les organismes procaryotes (constitués d’une seule cellule) comme les bactéries. Toutefois, leur analyse pourrait permettre d’en apprendre davantage sur le passé climatique de la Terre, mais aussi sur le futur paysage microbien vers lequel nous nous dirigeons. La carotte a été découpée en neuf parties distinctes qui couvrent trois cycles climatiques, du dernier cycle glaciaire à l’Holocène tardif. Or, les scientifiques ont découvert que les variétés de virus étaient très différentes en fonction des climats, plus chauds ou plus froids.
À terme, les chercheurs espèrent que ces informations pourront permettre d’améliorer les modèles de prévision. Selon les auteurs, une meilleure compréhension du lien entre les virus, le métabolisme bactérien et le climat permettrait par exemple de déterminer si les forêts et les zones humides sont des puits ou des sources de CO2. En revanche, le temps semble compté, car avec la fonte des glaces, ces mêmes informations sont progressivement en train de disparaitre.