Les feux de forêt qui surviennent à un rythme croissant aux hautes latitudes de l’hémisphère nord ont été mis en cause dans l’apparition de thermokarsts, ces affaissements de terrain provoqués par le dégel du pergélisol. Les résultats ont été publiés dans la revue scientifique One Earth le 9 décembre 2021.
Des chercheurs de l’Université de l’Illinois (États-Unis) ont quantifié l’impact des incendies de toundra sur le pergélisol alaskien en utilisant un ensemble d’observations aériennes et satellitaires effectuées au cours des soixante-dix dernières années. « Ce processus, parce qu’il est très imprévisible, est mal compris », rapporte Yaping Chen, auteure principale du papier. « Grâce à cette étude, nous approfondissons notre compréhension de l’écosystème associé au pergélisol ».
Thermokarsts : une contribution disproportionnée des feux de forêt
En s’appuyant sur un programme informatique basé sur l’apprentissage automatique, les chercheurs ont montré que la survenue de ces affaissements avait augmenté de 60 % entre 1950 et 2015. Le réchauffement climatique anthropique est ici en cause à la fois de façon directe à cause de la hausse des vagues de chaleur, mais également à travers l’accroissement des incendies de forêt. En effet, bien qu’ils ne concernent que 3 % du paysage sur la période d’étude, ils ont contribué pour plus de 10 % à la hausse observée.
« Les modèles de climat prédisent que les thermokarsts ne feront qu’augmenter avec le changement climatique », indique Mark Lara, coauteur de l’étude. « En plus de faire fondre le pergélisol, le réchauffement climatique assèche la toundra, ce qui augmente son inflammabilité. Cela augmente la probabilité que des éclairs déclenchent des incendies, induisant encore plus de dégradation du pergélisol ». Or, on rappelle que cette dégradation s’associe à d’importantes émissions de dioxyde de carbone (CO2) et de méthane (CH4), deux puissants gaz à effet de serre.
Les chercheurs ont également mis en évidence que les thermokarsts déclenchés à la suite d’incendies répétés en un même lieu ne différaient pas de ceux résultant d’un seul incendie. En outre, si l’étude est pour l’heure limitée à l’Alaska, il y a néanmoins des raisons de penser que des conclusions similaires sont valables pour les pergélisols canadien et sibérien. Enfin, notons que le dégel des sols polaires s’associe parfois à des manifestations encore plus impressionnantes comme l’apparition de larges cratères en surface ou la vidange soudaine de lacs.