Selon les résultats d’une étude dirigée par l’UNSW Water Research Laboratory (Australie), la survenue de fortes tempêtes sur les plages littorales peut redistribuer suffisamment de sable pour annuler les effets de plusieurs décennies d’élévation du niveau des mers. Les travaux ont été publiés dans la revue Nature Communications Earth & Environment ce 12 mai.
Une règle simple, dite règle de Bruun, permet de faire le lien entre l’élévation du niveau des mers et le retrait du littoral. Pour chaque mètre supplémentaire, le trait de côte est censé se retirer de vingt à cent mètres selon la pente du rivage. Aussi, pour la fin du siècle, la formule projette la disparition de près de la moitié des plages du monde.
Toutefois, cette règle a été remise en question à de nombreuses reprises en raison de son caractère très générique et de sa trop grande simplicité. En effet, chaque plage a ses propres caractéristiques et sa propre complexité, ce qui rend les évolutions réelles bien plus contrastées et potentiellement moins dramatiques.
De l’effet bénéfique des tempêtes pour les plages littorales
Dans ce contexte, un groupe international de chercheurs a montré que les évènements météorologiques extrêmes comme les tempêtes n’avaient pas que des impacts négatifs sur le trait de côte. Si l’on insiste souvent sur la propension des tempêtes à accentuer l’érosion côtière, les scientifiques ont montré que ces dernières contribuaient dans le même temps à alimenter la partie supérieure du rivage en sable. Ce faisant, elles tendent à protéger les plages de l’élévation du niveau des mers.
« Pour la première fois, nous avons regardé non seulement au-dessus de l’eau, où les impacts des tempêtes sont faciles à voir, mais aussi en dessous », rapporte Mitchell Harley, auteur principal de l’étude. « Ce que nous avons découvert, c’est que des centaines de milliers de mètres cubes de sable pénétraient le système littoral pendant ces évènements. Cela pourrait potentiellement suffire à compenser de plusieurs décennies certains impacts de l’élévation du niveau des mers causée par le changement climatique, comme le recul des côtes à long terme ».
Pour arriver à ces conclusions, les chercheurs ont étudié trois sites dans le monde avant et après le passage de tempêtes. Il s’agit pour ne pas les nommer de Narrabeen (Australie), Perranporth (Royaume-Uni) et La Misión (Mexique). Pour les trois plages, les mesures topographiques et bathymétriques ont montré qu’une importante quantité de sable avait été apportée du large ou des promontoires adjacents. À Perranporth, on a par exemple observé un gain de 420 000 mètres cubes de sable en 2018 à la suite de deux hivers très tempétueux.
En résumé, l’impact des fortes tempêtes sur l’évolution du trait de côte est ambivalent. On constate d’une part une érosion côtière et de l’autre un apport sédimentaire contribuant à un bilan global plus équilibré qu’on ne pourrait le penser et donc à des projections moins pessimistes. Cependant, en raison du manque de données quant au sable présent sous la mer au large des plages du monde, il est pour l’heure difficile d’évaluer la quantité qu’une tempête est capable de mobiliser.
« Nous devons répéter ce type de mesures pour plus de tempêtes et différents types de paramètres côtiers dans diverses conditions », indique le chercheur. « Ce n’est qu’alors que nous pourrons avoir une meilleure compréhension de la quantité de sable stockée au large des côtes qui pourrait potentiellement aider à amortir les impacts de l’élévation du niveau de la mer, et une image plus claire de ce à quoi nos plages pourraient ressembler en l’an 2100 et au-delà ».