Les tensions géopolitiques entre les États-Unis et la Chine autour de la question de Taïwan n’ont cessé d’évoluer au cours de ces dernières années. Au cœur de cette rivalité se trouvent les semi-conducteurs, essentiels à l’économie moderne, qui transforment l’île de Taïwan en un enjeu stratégique majeur. La situation est telle que ces tensions grandissantes pourraient bientôt mener à une guerre physique. Les services de renseignement américains suggèrent en effet que la marine chinoise se prépare à envahir Taïwan d’ici 2027. Si tel est le cas, la marine américaine pourra-t-elle résister ?
Tensions entre les États-Unis et la Chine autour de Taïwan : le rôle crucial des semi-conducteurs
Les tensions entre les États-Unis et la Chine autour de Taïwan ont atteint des niveaux sans précédent ces dernières années. Au cœur de cette rivalité, les semi-conducteurs, considérés comme la pierre angulaire de l’économie moderne, jouent un rôle déterminant. Taïwan, une petite île située au large des côtes chinoises, est en effet devenue un leader mondial dans la fabrication de ces composés et abrite des entreprises telles que la Taiwan Semiconductor Manufacturing Company (TSMC). Cette entreprise est l’un des plus grands fabricants de puces au monde et produit des semi-conducteurs pour des géants de la technologie comme Apple, NVIDIA et Qualcomm. La dépendance des États-Unis et d’autres nations occidentales envers Taïwan pour l’approvisionnement en semi-conducteurs a donc fait de l’île un enjeu stratégique majeur.
Le gouvernement chinois considère quant à lui Taïwan comme une province renégate et n’hésite pas à affirmer qu’il n’hésiterait pas à utiliser la force pour la réunifier avec le continent. La menace d’une invasion a donc suscité des inquiétudes croissantes à Washington. Et pour cause, une telle offensive chinoise pourrait entraîner un blocage des exportations de semi-conducteurs vers les États-Unis et ses alliés, ce qui déstabiliserait l’ensemble de l’industrie technologique mondiale. Pour rester compétitifs, les Américains doivent donc impérativement sécuriser leur approvisionnement en semi-conducteurs.

Les réactions américaines
Pour contrer cette menace, l’administration Biden a intensifié son engagement envers Taïwan, tant sur le plan militaire qu’économique. Les États-Unis ont récemment annoncé des ventes d’armes à l’île qui visent à renforcer ses capacités de défense face à l’agression chinoise.
Parallèlement, Washington cherche à diversifier ses chaînes d’approvisionnement en semi-conducteurs pour réduire sa dépendance à l’égard de Taïwan. La loi américaine sur les CHIPS (Creating Helpful Incentives to Produce Semiconductors for America) a également été adoptée pour encourager la production nationale de semi-conducteurs. Cette initiative vise à investir 52 milliards de dollars dans le secteur et à stimuler la recherche et le développement afin de maintenir l’avantage technologique des États-Unis face à la Chine.
La peur de l’embrasement
Ces tensions n’ont pas échappé aux analystes géopolitiques qui s’inquiètent d’une escalade potentielle. Les militaires chinois ont en effet intensifié leurs exercices autour de Taïwan avec des survols fréquents d’avions de chasse dans la zone d’identification de défense aérienne de l’île. En réponse, les États-Unis ont renforcé leur présence navale dans la région, menant des exercices militaires conjoints avec leurs alliés, notamment le Japon et l’Australie.
Cette dynamique a alimenté un cycle de méfiance et d’escalade. Les autorités chinoises dénoncent les interventions américaines comme des provocations tandis que Washington considère les actions de Pékin comme une menace à la paix et à la stabilité régionales. L’équilibre des pouvoirs devient de plus en plus délicat, alors que les deux puissances cherchent à affirmer leur dominance dans un monde multipolaire.
Quelle est la probabilité d’un conflit armé entre les États-Unis et la Chine ?
En 2021, l’amiral Phil Davidson, commandant du commandement indopacifique américain, avait déclaré devant le Congrès que la Chine pourrait envisager d’envahir Taïwan d’ici 2027. Une telle action mettrait alors les États-Unis et la République populaire de Chine sur une trajectoire de conflit. En 2022, le président Biden avait en effet clairement affirmé que les États-Unis défendraient Taïwan en cas d’invasion chinoise.
Bien que les services de renseignement américains n’aient pas confirmé de plans concrets de la marine de l’Armée populaire de libération (PLAN) pour mener cette attaque, il apparaît que la marine chinoise se prépare bel et bien activement à cette éventualité. Cette situation a incité les hauts responsables militaires américains à prendre des mesures préventives. La période post-2027, surnommée la fenêtre de Davidson, est donc devenue un enjeu clé dans la planification militaire des États-Unis.

Comparaison des forces maritimes de la Chine et des États-Unis
Un tel conflit engagerait nécessairement les forces maritimes de ces deux pays dans la région, mais que valent-elles précisément ?
Les porte-avions
États-Unis : la marine américaine dispose de 11 porte-avions, dont six sont affectés à la flotte du Pacifique. Chaque porte-avions est équipé d’une escadre aérienne de plus de 70 avions, incluant jusqu’à 44 chasseurs d’attaque F/A-18E/F Super Hornet et F-35C, ainsi que des avions d’alerte et de contrôle aéroportés E-2D Hawkeye et des hélicoptères utilitaires. Ces porte-avions bénéficient de plus d’un siècle d’expérience institutionnelle dans leur exploitation, ce qui leur confère une capacité opérationnelle élevée.
Chine : actuellement, la Chine exploite trois porte-avions : le Liaoning, le Shandong et le Fujian, tous armés de chasseurs d’attaque Shenyang J-15 Flying Shark . Ces porte-avions servent à la fois de navires de combat et de plates-formes d’apprentissage pour la marine chinoise (PLAN). Bien que la Chine puisse rapidement produire davantage de porte-avions, ceux-ci n’accueillent que deux tiers du nombre d’avions de leurs homologues américains et manquent encore d’une escadre aérienne bien équilibrée.
Les croiseurs et Destroyers
États-Unis : la flotte américaine du Pacifique comptera environ 52 croiseurs et destroyers d’ici 2027. Les destroyers américains, tels que ceux de classe Zumwalt et Arleigh Burke, surpassent leurs homologues chinois en nombre de silos à missiles (50 % de plus par navire) et en capacités offensives (anti-surface, anti-sous-marins, etc.). Les croiseurs américains, qui ont généralement 122 silos à missiles, sont en cours de retrait, mais la flotte continuera d’être soutenue par des destroyers performants.
Chine : la flotte de la PLAN est comparable en taille, avec environ 50 navires de surface, y compris des croiseurs de classe Renhai et des destroyers de type 052C et 052D. Cependant, leur puissance de feu est inférieure, chaque destroyer chinois ayant moins de silos à missiles que ses équivalents américains. De plus, les systèmes d’armement et de capteurs chinois n’ont pas été éprouvés dans des situations de combat réelles comme ceux des États-Unis.
Les sous-marins
États-Unis : d’ici 2027, la flotte sous-marine américaine du Pacifique comprendra environ 23 sous-marins, incluant des sous-marins d’attaque nucléaires de classe Los Angeles, Seawolf et Virginia. Ces sous-marins peuvent transporter des missiles de croisière Tomahawk et la nouvelle variante Block V des sous-marins Virginia augmentera la capacité d’armement.
Chine : la Chine possède actuellement 53 sous-marins d’attaque, mais ils sont généralement considérés comme ayant une ou deux générations de retard par rapport aux sous-marins américains. Néanmoins, avec le soutien de la Russie, la Chine pourrait rattraper son retard technologique dans ce domaine.
Les alliances et soutiens
États-Unis : les États-Unis bénéficient d’un réseau solide d’alliés dans la région Asie-Pacifique, y compris le Japon, la Corée du Sud et l’Australie. Ces pays possèdent respectivement 36 destroyers et 24 sous-marins d’attaque pour le Japon, ainsi que 23 sous-marins et 13 destroyers pour la Corée du Sud. Le soutien logistique et les bases américaines en temps de guerre renforcent encore leur position.
Chine : En revanche, la Chine a peu d’alliés fiables dans la région, à l’exception de la Russie. Toutefois, la coopération entre ces deux nations en matière de défense reste limitée et ne constitue pas une véritable alliance militaire.
En somme, bien que la Chine ait considérablement renforcé sa flotte, les États-Unis conservent des avantages significatifs en termes de technologie, d’expérience opérationnelle et de partenariats régionaux. La qualité des navires et des systèmes d’armement américains, couplée à des alliances solides, leur confère une position de force dans un éventuel conflit en mer. La modernisation continue de la marine chinoise sera évidemment un défi à surveiller, mais à court terme, les États-Unis semblent mieux placés pour faire face à une menace potentielle.
