Une étude française soutient que la consommation de tabac, même dans le cas d’une interruption avant la grossesse, peut affecter le placenta de la femme. Selon les chercheurs, le placenta conserverait une sorte de mémoire de l’exposition au tabac.
Des altérations du génome placentaire
Le tabac a des conséquences sur le placenta des femmes. Il s’agit en tout cas de la conclusion d’une étude publiée dans la revue BMC Medicine le 7 octobre 2020. Emmenés par Johanna Lepeule de l’Université de Grenoble, les chercheurs ont étudié l’ADN placentaire de 568 femmes réparties en trois catégories. La première concernait les femmes non-fumeuses et la seconde les femmes ayant arrêté de fumer dans les trois mois précédant la grossesse. La dernière catégorie regroupait des femmes ayant continué à fumer avant et pendant leur grossesse.
Selon les résultats, il y a des altérations dites « épigénétiques » dans 178 régions du génome placentaire. Plus précisément, il s’agit d’altérations de la méthylation de l’ADN. Autrement dit, la séquence d’ADN n’a pas fait l’objet de modifications, mais ce peut être le cas de l’expression des gènes. Par ailleurs, ces altérations étaient moins présentes chez les anciennes fumeuses. Néanmoins, chez ces dernières, les scientifiques ont retrouvé des altérations dans 26 régions du génome placentaire.

La « mémoire » de l’exposition au tabac
« Si un grand nombre de régions semblent avoir un profil de méthylation normal chez les femmes après arrêt du tabac, la présence de certaines modifications de méthylation de l’ADN dans le placenta de femmes ayant arrêté de fumer avant la grossesse suggère l’existence d’une mémoire épigénétique de l’exposition au tabac », a expliqué Johanna Lepeule dans un communiqué.
Le placenta conserverait donc la « mémoire » de l’exposition au tabac avant la grossesse. Par ailleurs, si les conséquences néfastes du tabac sur la santé des mères sont connues, les mécanismes à l’œuvre le sont beaucoup moins. De plus, le placenta est vulnérable face à de nombreuses substances chimiques. Or, les chercheurs ont constaté que les régions altérées du génome placentaire correspondent à des zones contrôlant à distance l’activation (ou la répression) des gènes. Évidemment, ceci joue un rôle très important dans le développement du fœtus. Selon Johanna Lepeule, les effets du tabagisme sur le fœtus et la santé ultérieure de l’enfant pourraient s’expliquer par ces modifications épigénétiques présentes dans le placenta des mères fumeuses.
En 2019, une étude étasunienne mettait en évidence la manière dont le tabagisme contribue au risque de mort subite du nourrisson. Le risque de mort subite du nourrisson (MSN) augmente avec chaque cigarette fumée pendant la grossesse. Pour rappel, environ 20 % des femmes enceintes fument en Europe.