Notre système immunitaire, essentiel pour protéger notre corps contre les infections et les maladies, a des racines qui remontent à des milliards d’années. Récemment, des scientifiques ont découvert que certaines des premières formes de défense immunitaire proviennent d’archées Asgard, des microbes unicellulaires anciens. Cette découverte met en lumière les connexions profondes entre les formes de vie les plus simples et les organismes complexes.
Trois piliers
Toutes les formes de vie sur Terre sont réparties en trois grands groupes : les bactéries, les archées et les eucaryotes. Les bactéries sont des organismes très simples, constitués de cellules sans noyau ni organites. Les eucaryotes possèdent en revanche un noyau contenant leur ADN et des organites spécialisés, comme les mitochondries, qui remplissent des fonctions spécifiques. C’est ce domaine qui inclut les plantes, les animaux et les champignons. Enfin, bien qu’elles soient des cellules simples comme les bactéries, les archées possèdent des caractéristiques plus proches des eucaryotes, notamment dans la manière dont elles utilisent l’énergie.
Parmi les archées, un groupe particulier nommé Asgard a récemment attiré l’attention des scientifiques. Ces organismes ont été découverts pour la première fois en 2015 dans une source hydrothermale en eaux profondes dans l’Arctique appelée le château de Loki.
Le lien entre les archées Asgard et la vie complexe
Les archées Asgard sont des microbes qui occupent une place unique dans l’évolution des organismes complexes. Elles se distinguent des bactéries par leur proximité avec les eucaryotes, notamment dans la manière dont elles organisent certaines protéines et gèrent l’énergie. Cette particularité les place comme un chaînon intermédiaire crucial qui révèle que les eucaryotes, et donc toute vie complexe sur Terre, ont évolué à partir de ces ancêtres.
Une des découvertes les plus fascinantes concernant les archées Asgard concerne leurs systèmes de défense contre les virus. Des chercheurs ont identifié deux classes de protéines, les vipérines et les argonautes, qui sont présentes chez les eucaryotes et aussi chez ces archées anciennes. Ces protéines jouent un rôle essentiel dans la lutte contre les infections virales.
Par exemple, les vipérines sont des protéines qui font partie du système de défense inné de l’organisme humain. Elles empêchent les virus de se multiplier en perturbant la production des protéines virales dans les cellules infectées. Les argonautes ont quant à eux été découverts pour la première fois dans des plantes et aident à bloquer les virus en découpant leur matériel génétique, ce qui empêche ainsi leur reproduction.
Les chercheurs ont découvert que les gènes codant pour ces protéines étaient beaucoup plus similaires entre les archées et les eucaryotes qu’entre les bactéries et les deux autres domaines, suggérant une origine commune. Les éléments clés de ces protéines, appelés sites catalytiques, auraient très peu changé au cours des deux milliards d’années depuis l’évolution des eucaryotes, ce qui témoigne de leur efficacité et de leur importance dans la défense contre les infections.
Pourquoi c’est important
Cette découverte, publiée dans Nature Communications, met en lumière à quel point les mécanismes de défense chez les eucaryotes, y compris les humains, sont profondément enracinés dans l’histoire ancienne de la vie sur Terre. Les protéines immunitaires identifiées chez les archées Asgard ont en effet été conservées et intégrées dans les systèmes immunitaires des organismes plus complexes comme les plantes, les animaux et les champignons. Cela suggère que ces systèmes de défense sont non seulement anciens, mais aussi remarquablement efficaces. Leur capacité à se préserver à travers des milliards d’années d’évolution indique qu’ils ont joué un rôle crucial dans la survie des premiers eucaryotes face aux menaces virales.
En outre, la persistance de ces éléments clés du système immunitaire montre que leur efficacité est telle que ces mécanismes n’ont guère besoin de changer pour rester performants. Cela illustre la stabilité et l’efficacité des systèmes de défense naturels qui ont su évoluer et se maintenir dans des environnements biologiques diversifiés.
En somme, cette recherche ne se limite pas à retracer l’évolution des systèmes immunitaires, elle souligne aussi l’importance de comprendre comment ces systèmes anciens ont contribué à façonner la complexité et la diversité des mécanismes de défense que nous observons aujourd’hui.