supraconductivité
Crédits : Université de Rochester / J. Adam Fenster

Supraconductivité : des chercheurs résolvent le mystère des arcs de Fermi

Dans le domaine de la physique moderne, la supraconductivité à haute température représente l’un des défis les plus fascinants et les plus mystérieux. Imaginez un matériau capable de conduire l’électricité sans aucune résistance, prévenant ainsi toute perte d’énergie sous forme de chaleur. Bien que ce phénomène soit étudié depuis des décennies, de nombreux aspects demeurent obscurs. Récemment, des chercheurs ont toutefois fait des avancées significatives en élucidant un aspect particulier de ce mystère : les arcs de Fermi dans les cuprates, une classe de matériaux supraconducteurs. La compréhension de ces arcs pourrait révolutionner notre approche de la supraconductivité et potentiellement ouvrir la voie à la découverte de matériaux capables de conserver cet état même à température ambiante, transformant ainsi notre façon de consommer de l’énergie et de traiter l’information.

Qu’est-ce que la supraconductivité ?

La supraconductivité est un phénomène physique au cours duquel certains matériaux conduisent l’électricité sans résistance lorsqu’ils sont refroidis à des températures très basses. Cela signifie que contrairement à des conducteurs comme le cuivre où une partie de l’énergie est perdue sous forme de chaleur, les supraconducteurs permettent un transport électrique sans perte d’énergie. Ce phénomène a été découvert pour la première fois en 1911 par le physicien néerlandais Heike Kamerlingh Onnes qui a observé que le mercure devenait supraconducteur à des températures proches du zéro absolu.

Il existe deux grandes catégories de supraconducteurs : les supraconducteurs de type I et de type II. Les supraconducteurs de type I, comme le plomb, présentent une transition nette entre l’état normal et l’état supraconducteur. Ils sont cependant limités à des températures très basses et ne peuvent pas supporter de champs magnétiques élevés. En revanche, les supraconducteurs de type II, comme les cuprates, peuvent fonctionner à des températures plus élevées et résistent à des champs magnétiques plus forts. Cette capacité fait des cuprates un sujet de recherche intensif, car ils pourraient avoir des applications pratiques dans des technologies avancées.

Le problème des arcs de Fermi

La théorie BCS (Bardeen-Cooper-Schrieffer), développée dans les années 1950, explique comment la supraconductivité se produit dans les métaux conventionnels. Selon cette théorie, les électrons se forment en paires appelées paires de Cooper qui se déplacent à travers le matériau sans résistance. Cependant, cette théorie ne s’applique pas entièrement aux supraconducteurs à haute température comme les cuprates qui présentent des comportements complexes encore mal compris, notamment en ce qui concerne les arcs de Fermi.

Les arcs de Fermi sont des courbes qui illustrent les directions spécifiques dans lesquelles les électrons peuvent se déplacer à l’intérieur des cuprates. Contrairement à ce que l’on pourrait attendre, ces électrons ne peuvent se déplacer que dans certaines directions définies. Ce comportement étrange défie les modèles théoriques existants, ce qui rend leur étude encore plus cruciale pour comprendre la supraconductivité.

La découverte de l’Université technique de Vienne

Une équipe de chercheurs dirigée par le Dr Alessandro Toschi a fait des avancées significatives dans la compréhension des arcs de Fermi dans les cuprates. Grâce à des méthodes expérimentales innovantes utilisant un laser pour expulser les électrons du matériau, ils ont en effet pu visualiser ces arcs et analyser comment les électrons interagissent au sein des cuprates.

L’équipe a ensuite développé des modèles théoriques et numériques qui expliquent ce comportement atypique des électrons. Ils ont alors découvert que ce phénomène est dû à des interactions magnétiques entre les électrons de différents atomes dans le matériau, spécifiquement des interactions antiferromagnétiques. Dans un matériau antiferromagnétique, les moments magnétiques des atomes s’alignent de manière alternée, un peu comme un échiquier où chaque case est colorée différemment de ses voisines.

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Spectroscopie laser pour déclencher des réactions chimiques dans des expériences de supraconductivité à température ambiante. Crédits : Lauren Petracca

Des implications futures

La découverte de l’équipe de l’Université technique de Vienne pourrait avoir des implications significatives pour la recherche future sur la supraconductivité. En comprenant mieux les arcs de Fermi et les interactions magnétiques, les scientifiques pourraient être en mesure de concevoir de nouveaux matériaux avec des propriétés non conventionnelles. Cela pourrait non seulement faire progresser notre compréhension fondamentale de la physique des matériaux, mais aussi ouvrir la voie à des applications pratiques dans les domaines de l’électronique, de l’énergie et des transports.

Imaginez des trains à lévitation magnétique, des lignes électriques sans pertes d’énergie ou encore des ordinateurs quantiques plus efficaces grâce à des matériaux supraconducteurs. Les applications potentielles de la supraconductivité sont vastes et pourraient transformer la société moderne.

Brice Louvet

Rédigé par Brice Louvet

Brice est un journaliste passionné de sciences. Ses domaines favoris : l'espace et la paléontologie. Il collabore avec Sciencepost depuis près d'une décennie, partageant avec vous les nouvelles découvertes et les dossiers les plus intéressants.