Les quantités de carbone capturées et stockées par les technologies visant à lutter contre le changement climatique ont été surestimées d’environ un quart sur les vingt dernières années. C’est en tout cas ce que rapporte une étude parue dans la revue Environmental Science & Technology Letters ce 14 juillet.
L’élimination du dioxyde de carbone de l’atmosphère (abrégé en CDR pour Carbon Dioxyde Removal) et la capture et séquestration du carbone (CCS pour Carbon Capture and Storage) sont des méthodes permettant respectivement de retirer du CO2 de l’atmosphère, donc de produire des émissions négatives, et de limiter les émissions de CO2 à la source, par exemple dans le cas d’une centrale électrique à charbon où les émanations sont captées et séquestrées sous terre.
Un stockage de carbone surestimé d’un quart sur la période 1996-2020
Si ces techniques sont d’ores et déjà utilisées dans la lutte contre le changement climatique, elles ne sont pas exemptes d’inconvénients. En particulier, l’absence d’un cadre commun de mesure et de communication des données (reporting) sur les quantités de carbone capturées et stockées conduit les inventaires nationaux à surestimer la contribution de ces technologies à l’objectif de neutralité carbone. Ce biais a récemment été quantifié par des chercheurs de l’Imperial College London (Angleterre).

Selon les données académiques dûment compilées par les scientifiques, la quantité de carbone capturée et stockée entre 1996 et 2020 s’élève à un peu moins de 200 millions de tonnes. Or, en analysant les inventaires officiels, on obtient un chiffre supérieur de 20 % à 30 %. Cette surévaluation est attribuée à l’absence de système centralisé de mesure et de reporting à l’échelle internationale. En effet, la capture, le transport et le stockage ne sont pas consignés de façon systématique et n’ont pas de cadre calculatoire strictement établi.
« La capture du carbone a le potentiel de modifier considérablement le destin de la planète, mais ces indications peu claires signifient qu’il n’y a pas de consensus international sur la quantité qui a été stockée jusqu’à présent, sauf pour les calculs académiques », regrette Samuel Krevor, coauteur de l’étude. « Nous avons besoin de toute urgence de paramètres clairement définis afin de savoir exactement où nous en sommes ».

De la différence entre capacités installées et stockage réel
Pour obtenir ces résultats, les chercheurs ont dû mener un lourd travail de synthèse de la littérature académique pour vingt des vingt-six stations de CCS actuellement opérationnelles dans le monde. Ils ont ainsi découvert que leurs estimations étaient plus basses par rapport aux inventaires gouvernementaux qui se contentent de reporter la capacité de capture installée. Or, comme les technologies ne fonctionnent pas toujours à plein régime et que les définitions peuvent changer, les chiffres basés sur les capacités installées sont surestimés.
« Le CCS est une technologie climatique relativement nouvelle qui contribue déjà de manière significative à la lutte contre le changement climatique », constate Chris Jackson, coauteur du papier. « Cependant, nous montrons que la capacité de capture n’est pas la meilleure façon de mesurer les taux de stockage et que les gouvernements devraient idéalement imposer l’utilisation d’une métrique de fond basée sur le carbone capturé ».