Le squelette néandertalien le plus complet jamais découvert n’est toujours pas exhumé

néandertalien l'Homme d'Altamura
Les traits de l'Homme d'Altamura ne sont pas ceux de la plupart des autres Néandertaliens. Crédits : Costantino Buzi et al., Quaternary Science Reviews, 2024

Au cœur d’une grotte du sud de l’Italie se trouve le squelette de l’Homme d’Altamura, un Néandertalien âgé de 130 000 à 172 000 ans enchâssé dans sa tombe naturelle depuis sa mort. Découvert en 1993, ce fossile représente l’un des plus spectaculaires jamais trouvés, mais son extraction reste une tâche ardue en raison des conditions exceptionnelles dans lesquelles il est conservé. 

150 000 ans la tête en bas

La découverte de l’Homme d’Altamura remonte à 1993 lorsque les chercheurs ont repéré un crâne néandertalien dépassant d’un mur dans le système karstique de Lamalunga, près d’Altamura. Ce crâne faisait partie d’un squelette pratiquement complet qui était resté enfoui dans cette grotte pendant environ 150 000 ans. L’emplacement exact du squelette est à la fois fascinant et frustrant : il se trouve dans une partie difficile d’accès du réseau de cavernes, en raison de l’accumulation de dépôts calcaires et de formations rocheuses complexes.

L’analyse initiale a également révélé que le squelette était positionné la tête en bas et était recouvert d’une couche épaisse de calcite, souvent appelée popcorn des cavernes en raison de son apparence. Cette calcite a agi comme une sorte de piège naturel, préservant le squelette, mais aussi le liant de manière presque indissociable à la roche environnante. Les os, désormais solidement fusionnés avec la roche, rendent toute tentative d’extraction extrêmement complexe. Les techniques d’extraction conventionnelles risqueraient en effet d’endommager le précieux fossile, ce qui a conduit les chercheurs à adopter une approche plus prudente.

Les conditions de la grotte ajoutent à la difficulté : la température et l’humidité constantes créent un environnement stable pour la conservation des fossiles, mais compliquent également les efforts de désincarcération.

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Une reconstruction du visage de l’homme d’Altamura. Crédits : Roberto Montanari

Que savons-nous de ce néandertalien ?

Naturellement, les chercheurs ont déjà essayé diverses méthodes non invasives pour étudier le squelette, notamment des rayons X portables, des caméras endoscopiques à haute résolution et des scanners laser miniatures pour observer à travers les minuscules ouvertures de la paroi rocheuse.

Ces recherches, menées in situ de 2016 à 2020, ont révélé que l’Homme d’Altamura était un Néandertalien adulte qui souffre de pathologies dentaires courantes. Plus fascinant encore, les analyses ont mis en évidence des caractéristiques morphologiques inédites chez les Néandertaliens. Une reconstruction numérique du crâne a notamment révélé des traits similaires à ceux d’un hominidé plus ancien datant d’environ 430 000 ans. Autrement dit, les résultats de ces études ont montré que l’Homme d’Altamura possédait un mélange unique de caractéristiques archaïques et modernes.

Cette combinaison pourrait éclairer de nouveaux aspects de l’évolution des Néandertaliens et de leur diversité. Les chercheurs pensent que cette population néandertalienne isolée a conservé des traits anciens plus longtemps que leurs homologues eurasiens, ce qui fournit un aperçu précieux de l’évolution humaine.

En attendant, l’Homme d’Altamura demeure encore aujourd’hui dans sa grotte, préservé dans une capsule temporelle naturelle. Les scientifiques continuent d’espérer des avancées technologiques qui pourraient permettre une extraction réussie sans compromettre la valeur scientifique du fossile.

L’étude est publiée dans la revue Quaternary Science Reviews.