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Ces sphĂ©rules draguĂ©es dans le Pacifique sont-elle d’origine interstellaire ?

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Gros plan de l'une des sphérules métalliques « anormales » extraites de l'océan Pacifique en juin 2023. Des objets comme ceux-ci sont abondants et presque impossibles à retracer. Crédits : Avi Loeb/Medium

L’Ă©tĂ© dernier, le professeur Avi Loeb, de Harvard, suggĂ©rait que de minuscules pastilles de fer trouvĂ©es dans l’ocĂ©an Pacifique pouvaient provenir d’une mĂ©tĂ©orite interstellaire potentiellement porteuse de technologie extraterrestre. Cependant, de nouvelles Ă©tudes suggèrent que ces sphères pourraient en rĂ©alitĂ© ĂŞtre liĂ©es Ă  une simple pollution industrielle, rĂ©sultant probablement de la combustion du charbon sur Terre.

Des restes interstellaires dans l’ocĂ©an ?

Chaque annĂ©e, des milliers de mĂ©tĂ©orites de tailles diverses arrivent sur Terre et toutes proviennent de notre Système solaire. Il y a plusieurs mois, Avi Loeb, de Harvard, avait cependant suggĂ©rĂ© l’idĂ©e qu’une mĂ©tĂ©orite nommĂ©e « IM1 », connue pour avoir explosĂ© au-dessus de l’ocĂ©an Pacifique le 9 janvier 2014, pourrait avoir une origine interstellaire en raison de sa vitesse très Ă©levĂ©e.

L’Ă©tĂ© dernier, le chercheur et son Ă©quipe ont donc mis en place une expĂ©dition avec un traĂ®neau magnĂ©tique dans le but de collecter des morceaux de cette mĂ©tĂ©orite tombĂ©s au fond de l’ocĂ©an. L’opĂ©ration fut un succès. Après un rapide examen, les chercheurs ont alors confirmĂ© leur idĂ©e que plusieurs de ces minuscules boules mĂ©talliques extraites au large des cĂ´tes de Papouasie-Nouvelle-GuinĂ©e Ă©taient probablement des restes d’une mĂ©tĂ©orite interstellaire en raison de leur composition proposant un pourcentage Ă©levĂ© de bĂ©ryllium, de lanthane et d’uranium, ajoutant qu’elles pourraient mĂŞme contenir des signatures de technologie extraterrestre.

Néanmoins, de nombreux scientifiques non liés avaient rapidement contesté ces affirmations. Plusieurs études publiées récemment vont également dans ce sens.

Pourquoi tant de doutes sur l’origine interstellaire de cette mĂ©tĂ©orite ?

Premièrement, au cĹ“ur du dĂ©bat sur l’origine interstellaire du mĂ©tĂ©ore se trouve la question de son enregistrement. Les donnĂ©es proviennent en effet uniquement de rares Ă©quipements, soulevant des doutes sur leur fiabilitĂ©. Certains chercheurs suggèrent en effet qu’une possible erreur dans l’enregistrement de la vitesse pourrait remettre en question la conclusion selon laquelle le mĂ©tĂ©ore serait issu d’un autre système. Un nouvel article, non Ă©valuĂ© par des pairs et publiĂ© sur arXiv le 13 novembre, explore d’ailleurs cette perspective.

Dans cette publication, les professeurs Steven Desch de l’UniversitĂ© d’État de l’Arizona et Alan Jackson de l’UniversitĂ© de Towson contestent en effet la viabilitĂ© de la thĂ©orie interstellaire. Ils y soulignent que si la vitesse a Ă©tĂ© correctement enregistrĂ©e, il serait peu probable que des morceaux importants survivent Ă  la chute dans l’atmosphère. Selon leurs estimations, s’ils Ă©taient rĂ©ellement interstellaires, moins de 0,2 % de ces matĂ©riaux auraient survĂ©cu Ă  l’entrĂ©e dans l’atmosphère.

Une autre difficultĂ© majeure rĂ©side dans la localisation du mĂ©tĂ©ore de 2014. Les scientifiques ignorent en effet oĂą il a atterri prĂ©cisĂ©ment ou s’il a mĂŞme touchĂ© terre. En outre, la recherche de minuscules fragments de sphĂ©rules dans un rayon d’une cinquantaine de kilomètres près de dix ans après son entrĂ©e dans l’atmosphère est une tâche ardue. Les conditions ocĂ©aniques et le manque d’informations prĂ©cises sur la trajectoire du mĂ©tĂ©ore rendent ainsi cette entreprise extrĂŞmement complexe.

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Crédits : Trifonov_Evgeniy/iStock

Des contaminants terrestres ?

Les petites boules métalliques, telles que les sphères étudiées, sont également abondantes dans les fonds marins et leurs origines peuvent être multiples.

La composition des sphĂ©rules mĂ©talliques suscite aussi des interrogations. Bien que leur origine spatiale soit hypothĂ©tique, leur composition prĂ©sente Ă©galement des caractĂ©ristiques Ă©tonnamment similaires aux contaminants des cendres de charbon, comme le met en lumière une publication rĂ©cente dans la revue Research Notes of the AAS, datĂ©e du 23 octobre. Cette observation tend donc Ă  Ă©carter l’hypothèse d’une origine mĂ©tĂ©oritique au profit d’une possible connexion avec une source terrestre liĂ©e Ă  des activitĂ©s industrielles.

Un débat encore ouvert sur ces sphérules

Est-il encore possible que les sphĂ©rules proviennent de quelque part en dehors de notre Système solaire ? Oui, mais sur la base des preuves disponibles, il semble bien plus probable qu’ils soient originaires de beaucoup plus près de chez nous.

De son cĂ´tĂ©, Avi Loeb a rĂ©pondu Ă  ces critiques dans un article de blog datĂ© du 15 novembre, arguant que les nouveaux articles ne peuvent pas Ă©valuer de manière adĂ©quate la composition des sphĂ©rules sans les Ă©tudier directement. Il ajoute Ă©galement que la rĂ©gion oĂą l’expĂ©dition a eu lieu ne devrait avoir aucune minĂ©ralisation de charbon. De plus, le charbon est amagnĂ©tique et ne peut pas ĂŞtre captĂ© par le traĂ®neau magnĂ©tique utilisĂ© lors de l’expĂ©dition.