Tout comme le simple fait de voir un ami après une semaine de travail stressante peut vous permettre de vous sentir mieux, il a été constaté que les serpents à sonnette se sentent aussi plus calmes en la présence de certains de leurs congénères. C’est l’une des premières fois qu’un tel « tampon social » est observé chez les reptiles. Les détails de ces travaux sont publiés dans la revue Frontiers in Ethology.
Réponse au stress
Le stress est une réaction de l’organisme à des conditions imprévisibles et/ou défavorables. Pendant ce temps, l’axe hypothalamo-hypophyso-surrénal (HPA) (un système de régulation complexe entre l’hypothalamus, l’hypophyse et les glandes surrénales) s’active. Cela a pour effet de libérer certaines hormones dans le sang, telles que le cortisol.
La présence de ces hormones permet de lutter en modifiant les fonctions de l’organisme, que ce soit contre les facteurs de stress aigu qui sont de courte durée (comme une rencontre avec un prédateur) ou contre le stress chronique qui survient sur une plus longue durée dans des conditions défavorables, entraînant une exposition prolongée à des niveaux élevés de glucocorticoïdes.
Toutefois, la présence d’un congénère lors d’une rencontre avec un agent stressant peut parfois moduler la réponse de l’axe HPA. Cet effet favorable sur la santé est appelé tampon social. Ce phénomène est bien documenté chez les animaux hautement sociaux, tels que les poissons, les oiseaux, les mammifères, les primates et les humains. Il a aussi été observé chez un seul groupe d’invertébrés : les termites. Cependant, aucune réponse de ce genre n’avait été documentée chez les reptiles qui sont considérés comme des organismes asociaux. C’est désormais chose faite.

Le cas des serpents à sonnette
Pour cette étude, les chercheurs ont capturé vingt-cinq crotales du Pacifique Sud dans la nature. Ces serpents à sonnette sont largement répandus en Amérique du Sud, notamment dans des pays tels que le Brésil, l’Argentine, la Bolivie et le Paraguay. Les scientifiques ont ensuite évalué l’impact du stress lorsque les serpents étaient seuls, avec un compagnon de même sexe ou avec un objet témoin. Les réponses au stress ont été mesurées via leur fréquence cardiaque enregistrée à l’aide d’électrodes.
L’équipe a finalement observé que les serpents avaient une augmentation beaucoup plus faible de la fréquence cardiaque lorsqu’ils étaient en compagnie d’un congénère. De plus, leur pouls élevé revenait à la normale plus rapidement que les autres.
« Nous avons montré que lorsque deux serpents étaient ensemble et vivaient une situation stressante, ils pouvaient amortir la réponse au stress de l’autre, un peu comme ce qui arrive aux humains lorsqu’ils endurent un événement stressant ensemble« , résume ainsi Chelsea Martin, de l’université de Loma Linda en Californie. « Cet amortissement de la réponse au stress n’a été signalé auparavant chez aucune espèce de reptile. »
Par ailleurs, le fait que ces serpents aient été étudiés à l’état sauvage plutôt qu’en captivité depuis leur naissance confirme qu’il s’agit probablement d’une réaction naturelle.
De plus en plus de preuves suggéraient que les serpents pouvaient présenter des comportements parfois complexes indiquant des interactions sociales. Les crotales à dos de diamant de l’Ouest mâles (Crotalus atrox) ont par exemple été observés en train de veiller sur leur partenaire. Ces nouveaux travaux nous le prouvent donc une fois de plus.
