Le roboticien Rodney Brooks ne croit pas vraiment aux vertus du développement robots humanoïdes. L’intéressé a récemment remis en question les grandes promesses de Tesla et autres start-up œuvrant dans ce domaine. Le spécialiste estime que ces machines sont trop dangereuses pour les humains.
La dangerosité en cas de chute
Co-fondateur des sociétés Rethink Robotics (2008) et Robust AI (2019), Rodney Brooks est un roboticien et écrivain australien de renom. Dans un long billet de blog publié le 26 septembre 2025, l’expert a notamment critiqué Tesla et son robot humanoïde Optimus. Il faut dire que depuis quelques années, la société d’Elon Musk et bien d’autres comme Unitree Robotics promettent une arrivée en masse de ces machines dans les usines, les établissements de santé mais également les foyers.
Rodney Brooks a parlé d’illusion dangereuse. L’une des raisons principales n’est autre que la dangerosité en cas de chute. Afin de se déplacer sur deux jambes, les robots humanoïdes accumulent une grande quantité d’énergie cinétique et toute chute – ou mouvement brusque – peut blesser grièvement tout humain se situant à proximité. Pour Rodney Brooks, le risque est tel que ce dernier conseille de ne pas s’approcher à moins de trois mètres de ce type de machine.
Une dextérité trop lointaine de celle de l’humain
Le spécialiste a aussi évoqué la dextérité de ces robots, qu’il qualifie de mythe. Alors que de nombreuses start-ups affirment entrainer leurs machines avec des vidéos de travailleurs effectuant diverses tâches de manière assidue, Rodney Brooks rappelle que l’habilité humaine repose avant tout sur le toucher. Or, la main compte environ 17 000 capteurs sensoriels, dont près d’un millier dans chaque doigt. Ceci nous permet habituellement de détecter les vibrations et autres micro-mouvements. Autrement dit, sans ce sens toucher riche et complexe, les robots humanoïdes ne peuvent absolument pas atteindre le niveau de dextérité des humains.
« L’élément central de mon argument est que les approches d’apprentissage par force brute [ndlr : recherche exhaustive] que tout le monde présente à juste titre comme de grandes réussites s’appuyaient sur des interfaces très soigneusement conçues et spécifiques à chaque cas pour extraire les bonnes données de la cacophonie de signaux bruts que présente le monde réel. », peut-on lire dans la publication du roboticien.

Des machines oubliées dans une quinzaine d’années ?
Rodney Brooks estime que les folles sommes d’argent investies dans le développement de robots humanoïdes bipèdes reposant uniquement sur la vision est synonyme de gaspillage. Par ailleurs, la définition même de la notion de « robot humanoïde » pourrait évoluer avec le temps, comme ce fut le cas des notions de « voiture volante » et de « voiture autonome ». Dans un premier temps, les robots auront des roues à la place des pieds, d’abord deux puis peut-être plus mais pas vraiment de jambes similaires à celles des humains. Certaines machines de ce type existent déjà, et nous continuons de les appeler « robots humanoïdes ».
D’autres versions plus futuristes pourraient avoir plus de deux bras, avec cinq doigts au niveau des mains mais peut-être, deux rangées parallèles de cinq doigts ou encore, des ventouses. Plus tard, d’autres modèles seront bardés de capteurs et de caméras passives leur donnant potentiellement la capacité de voir leur environnement dans des gammes de fréquences inaccessibles aux humains. A terme, les robots prendront des formes très différentes, même chose en ce qui concerne leurs propriétés, leurs capacités etc.
Dans tous les cas selon Rodney Brooks, nous continuerons de qualifier ces machines de robots humanoïdes, ce qui s’éloigne de l’idée initiale. Enfin, la vision du roboticien concerne les quinze prochaines années, après quoi ces mêmes machines pourraient être progressivement laissées de coté puis oubliées.
