Dans l’imaginaire populaire, la fameuse potion magique de Panoramix, le druide d’Astérix, permet aux Gaulois de repousser les Romains avec une force surhumaine. Et si cette « potion magique » n’était pas qu’une invention fictive ? Une étude récente, menée par des chercheurs polonais, suggère en effet que les guerriers germaniques pourraient bien avoir consommé des stimulants pour se donner du courage et augmenter leur énergie avant de partir à la bataille à l’époque romaine.
Des indices surprenants retrouvés sur les champs de bataille
Les peuples germaniques, souvent appelés barbares par les Romains, vivaient principalement en dehors de l’Empire romain, dans les régions qui correspondent aujourd’hui à l’Allemagne, la Scandinavie et la Pologne.
Bien que l’histoire regorge de récits sur les usages de substances par les Grecs et les Romains, notamment l’opium ou le vin, peu de recherches ont porté sur les pratiques des tribus germaniques en matière de stimulants. Néanmoins, une équipe de chercheurs, dirigée par l’archéologue Andrzej Kokowski et deux biologistes de l’université Maria Curie-Sklodowska, a découvert un indice fascinant : 241 petits objets retrouvés sur 116 sites archéologiques datés de l’époque romaine. Ces artefacts étaient attachés aux ceintures des guerriers et prenaient la forme de cuillères ou de petits bols.
Loin d’être de simples objets décoratifs, ces artefacts ont intrigué les chercheurs qui ont émis l’hypothèse que ces cuillères et bols auraient pu être utilisés pour consommer des substances psychoactives avant les combats. « Ils auraient servi à mesurer les doses de stimulants pour augmenter la performance des guerriers et réduire leur stress« , expliquent les chercheurs. Une sorte de « courage liquide », à l’instar de la potion magique de Panoramix, mais à base de plantes et de champignons locaux.
Quels stimulants étaient utilisés ?
La question qui se pose maintenant est de savoir quelles substances ces guerriers pouvaient bien consommer. Selon les chercheurs, plusieurs plantes et champignons psychotropes étaient disponibles dans l’Europe du Nord à cette époque. Parmi les candidats les plus probables, on trouve le pavot (source de l’opium), le chanvre, le houblon, mais aussi des plantes plus exotiques comme la belladone et la jusquiame. Ces substances pouvaient être ingérées sous forme liquide ou en poudre et étaient parfois utilisées à des fins rituelles ou médicinales.
Les guerriers germaniques n’étaient donc probablement pas étrangers aux effets de ces plantes. Les substances psychoactives pouvaient les aider à se préparer mentalement avant une bataille en réduisant le stress et en augmentant la perception de leur propre courage. Si l’on considère que les combats étaient souvent brutaux et stressants, il n’est pas surprenant que ces peuples aient cherché des moyens de se renforcer psychologiquement.
L’impact sur l’économie et la société
Ce qui est particulièrement intéressant dans cette découverte, c’est l’implication sociale et économique que pourrait avoir eu l’utilisation de ces stimulants. Les chercheurs soulignent que la demande pour ces substances aurait nécessité une organisation importante. Les guerriers germaniques auraient non seulement dû se procurer ces plantes, mais leur culture et leur distribution auraient aussi pu être une source de revenus pour certaines tribus. En période de guerre, les stimulations physiques et mentales des guerriers étaient cruciales, et il est possible que ces substances aient joué un rôle dans l’économie de guerre de l’époque.
De plus, les substances utilisées par les peuples germaniques n’étaient pas seulement destinées à améliorer les performances en temps de guerre. Elles étaient également associées à des rites spirituels et médicinaux, ce qui témoigne d’une profonde connaissance des propriétés des plantes et champignons. La consommation de ces stimulants pourrait ainsi avoir renforcé les liens sociaux au sein des tribus, en les unissant autour de pratiques communes.
Cette étude remet en cause plusieurs idées reçues sur l’utilisation des stimulants dans l’Antiquité. Alors que l’on pensait que seules les civilisations méditerranéennes utilisaient ces substances, cette nouvelle recherche montre que les peuples germaniques pourraient avoir eu une relation bien plus complexe avec ces produits que ce que l’on imaginait. Bien sûr, il est difficile de savoir avec certitude si ces pratiques étaient généralisées ou réservées à une élite guerrière, mais les preuves archéologiques permettent de jeter un nouvel éclairage sur les pratiques des peuples dits barbares.