Mars pourrait nous aider à évaluer l’habitabilité des planètes lointaines

Crédits : NASA/Wikimedia commons

Combien de temps une planète ressemblant à Mars pourrait-elle être habitable si elle était en orbite autour d’une étoile naine rouge ? Une question complexe à laquelle la mission MAVEN, de la NASA, pourrait répondre.

Mars est aujourd’hui désertique, sèche, froide (température au sol moyenne de −53 °C) et dotée d’une atmosphère très ténue. Nous savons en revanche que la planète rouge était autrefois (il y a environ 4 milliards d’années) chaude et dotée d’une atmosphère suffisamment dense pour permettre à l’eau de couler à l’état liquide à sa surface. La sonde MAVEN, qui circule sur une orbite elliptique autour de Mars, a pour mission de déterminer les mécanismes à l’origine de la quasi disparition de son atmosphère. Mais ces informations pourraient-elles servir de « patron » pour des planètes extrasolaires ?

Il semblerait que oui. « La mission MAVEN nous dit que Mars a perdu des quantités substantielles de son atmosphère au fil du temps, changeant l’habitabilité de la planète », explique David Brain, un co-chercheur MAVEN et professeur au Laboratoire de physique atmosphérique et spatiale de l’Université du Colorado à Boulder. « Nous pouvons également nous baser sur Mars, une planète que nous connaissons beaucoup, comme une sorte de laboratoire pour étudier les planètes rocheuses en dehors de notre Système solaire, dont nous ne savons pas encore grand-chose ».

Lors de la réunion d’automne de l’American Geophysical Union tenue le 13 décembre dernier à La Nouvelle-Orléans en Louisiane, David Brain a notamment décrit comment les enseignements de la mission MAVEN pouvaient être appliqués à l’habitabilité des planètes rocheuses en orbite autour d’autres étoiles.

Au cours des trois dernières années, le Soleil a traversé des périodes d’activité solaire tantôt plus élevées, tantôt plus faibles. Mars a donc subi des tempêtes et des éruptions solaires ainsi que des éjections de masse coronale. Ces conditions changeantes ont donné à MAVEN l’opportunité d’analyser l’évasion atmosphérique de Mars.

En appliquant ces idées à une hypothétique planète Mars en orbite autour d’une naine rouge, la classe d’étoiles la plus commune dans notre galaxie, les chercheurs ont noté que la brillance d’une naine rouge aux longueurs d’onde de l’ultraviolet, combinée à une orbite rapprochée, signifierait que cette planète serait frappée avec environ 5 à 10 fois plus de rayonnement UV que la véritable Mars. Cela augmente la quantité d’énergie disponible pour alimenter les processus responsables de l’échappement atmosphérique. Sur la base de ce que MAVEN nous a appris, les chercheurs ont alors étudié comment les processus d’échappement individuels répondraient à l’augmentation des rayons UV.

Leurs calculs indiquent que l’atmosphère de la planète pourrait perdre 3 à 5 fois plus de particules chargées, un processus appelé « fuite d’ions », et environ 5 à 10 fois plus de particules neutres pourraient être perdues par un processus appelé « évasion photochimique ». Ce dernier se produit lorsque le rayonnement UV brise des molécules dans la haute atmosphère. Parce que plus de particules chargées seraient créées, il y aurait aussi plus de pulvérisation cathodique, une autre forme de perte atmosphérique. La pulvérisation se produit lorsque des particules énergétiques sont accélérées dans l’atmosphère et heurtent des molécules, projetant certaines d’entre elles dans l’espace et renvoyant d’autres s’écraser sur leurs voisines, comme le fait une bille blanche dans une partie de billard.

Enfin, la planète hypothétique pourrait connaître la même quantité d’échappement thermique, qui ne concerne ici que les molécules plus légères, telles que l’hydrogène. Mars perd son hydrogène par échappement thermique au sommet de l’atmosphère. Sur cette planète exo-Mars, l’échappement thermique n’augmenterait que si l’augmentation du rayonnement UV poussait plus d’hydrogène vers le haut de l’atmosphère.

Au total, les estimations suggèrent que la mise en orbite au bord de la zone habitable d’une étoile de classe M tranquille (naine rouge), au lieu de notre Soleil, pourrait réduire la période habitable de la planète d’un facteur de 5 à 20. Pour une étoile plus « énervée », cette période habitable pourrait être réduite d’un facteur 1000 – la réduisant à un simple clin d’œil en termes géologiques. Les tempêtes solaires seules pourraient éradiquer la planète avec des éclats de radiation des milliers de fois plus intenses que l’activité normale de notre Soleil.

« L’habitabilité est l’un des plus grands sujets de l’astronomie, et ces estimations démontrent un moyen de tirer parti de ce que nous savons de Mars et du Soleil pour définir les facteurs qui déterminent si les planètes d’autres systèmes pourraient convenir à la vie« , note le chercheur. Ici, une planète de type Mars en orbite autour d’une naine rouge pourrait-elle être habitée ? Sûrement pas.

Vous retrouverez tous les détails de ces recherches sur le site de la NASA.

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