Des chercheurs ont récemment mis en lumière une connexion fascinante entre certains des plus grands et des plus petits objets de l’univers : les trous noirs supermassifs (SMBH) et les particules de matière noire. Cette découverte pourrait résoudre l’énigme du « problème du parsec final », un obstacle majeur dans la compréhension des fusions de trous noirs supermassifs.
Le problème du parsec final et la matière noire
Les trous noirs supermassifs, dont la masse peut atteindre des milliards de fois celle du Soleil, se trouvent généralement au centre des galaxies. Lorsqu’elles entrent en collision, ces galaxies voient leurs trous noirs respectifs rentrer en orbite l’un autour de l’autre et s’approcher progressivement jusqu’à fusionner. Cependant, les simulations théoriques ont montré que ce rapprochement s’arrête lorsque les deux trous noirs atteignent une distance d’environ un parsec (environ trois années-lumière).
Dans le détail, les modèles précédents montraient que lorsque deux de ces énormes trous noirs se rapprochaient l’un de l’autre, leur gravité commençait à éjecter les particules de matière noire environnantes. Imaginez deux énormes tourbillons dans l’eau qui repoussent les débris flottants. De la même manière, les trous noirs supermassifs repoussaient la matière noire autour d’eux. Cette éjection des particules de matière noire créait alors un vide ou une raréfaction autour des trous noirs.
Ce vide posait un problème majeur. La fusion des trous noirs dépend en effet du fait qu’ils perdent de l’énergie en interagissant avec la matière autour d’eux. Lorsque les particules de matière noire sont éjectées, il ne reste donc plus suffisamment de matière pour continuer à absorber l’énergie des trous noirs. Résultat : ils ralentissent leur rapprochement et s’arrêtent à environ trois années-lumière l’un de l’autre.
Ce phénomène connu sous le nom de « problème du parsec final » empêchait donc la fusion de ces objets, contredisant ainsi les observations d’ondes gravitationnelles émanant de l’univers. Ces ondes gravitationnelles sont en effet supposées provenir de la fusion de millions de paires de trous noirs supermassifs.

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Crédits: ClaudioVentrella/istockUn nouveau modèle
Pour tenter de résoudre ce problème, une équipe de chercheurs dirigée par l’astronome Alexander Pavlov, du Goddard Space Flight Center de la NASA, a développé un nouveau modèle proposant une perspective différente et plus optimiste. Concrètement, les chercheurs ont introduit l’idée que les particules de matière noire ne sont pas simplement éjectées et dispersées sans interaction. Elles pourraient en réalité interagir entre elles de manière à rester suffisamment denses autour des trous noirs.
Pour simplifier, imaginez des particules de matière noire formant un réseau invisible qui, même après avoir été perturbé, se réorganise et maintient une certaine densité. Grâce à ces interactions, les particules de matière noire continuent à absorber de l’énergie des trous noirs supermassifs en orbite, ce qui les aide ainsi à continuer à se rapprocher l’un de l’autre.
Cette nouvelle compréhension change tout. Si les particules de matière noire peuvent effectivement interagir entre elles et maintenir une densité suffisante, alors les trous noirs supermassifs peuvent continuer à perdre de l’énergie et finir par fusionner. Cela expliquerait pourquoi nous observons des ondes gravitationnelles provenant de telles fusions dans l’univers.
Cette recherche ne se limite pas à la compréhension du « problème du parsec final »; elle ouvre également une fenêtre sur la nature de la matière noire elle-même. Les chercheurs ont en effet découvert que l’évolution des orbites des trous noirs est très sensible à la microphysique de la matière noire, ce qui signifie que nous pourrions utiliser les observations de fusions de trous noirs supermassifs pour mieux comprendre ces particules.