Voici à quoi ressemblait le plus grand arthropode de l’histoire

mille-pattes
Crédits : Neil Daves

Imaginez un mille-pattes géant de près de trois mètres de long doté de dizaines de pattes et pesant jusqu’à 50 kilos. Si cette créature semble tout droit sortie d’un film de science-fiction, elle a pourtant bien existé il y a environ 300 millions d’années. Cet animal colossal, connu sous le nom d’Arthropleura, était le plus grand arthropode terrestre à avoir jamais vécu. Malgré les nombreux fossiles découverts, les scientifiques ont longtemps ignoré à quoi ressemblait sa tête, jusqu’à ce qu’une nouvelle découverte leur permette enfin de lever le voile sur ce mystère fascinant.

Une énigme de longue date

Depuis la fin des années 1800, les chercheurs ont collecté des fragments de fossiles et des empreintes d’Arthropleura en Europe et en Amérique du Nord. Ces fossiles, souvent retrouvés sans tête, ont laissé les scientifiques perplexes. En effet, les Arthropleura, comme beaucoup d’arthropodes, muent en grandissant. Lors de ce processus, ils se débarrassent de leur exosquelette en se tortillant hors de celui-ci par une ouverture à la tête, laissant derrière eux une coquille vide. Cela explique pourquoi tant de fossiles de cette créature ne possédaient pas cette partie du corps qui est essentielle pour comprendre à quoi ils ressemblaient vraiment.

Plus récemment, une équipe de chercheurs a cependant eu la chance de tomber sur des fossiles de juvéniles Arthropleura parfaitement conservés, avec leur tête intacte. Ces spécimens découverts dans un ancien gisement de charbon français ont permis d’enfin révéler ce à quoi ressemblait cette partie du corps.

Une tête peu effrayante pour une créature gigantesque

La première surprise des scientifiques après l’analyse des fossiles a été de constater que, malgré sa taille impressionnante, l’Arthropleura n’avait pas une tête particulièrement terrifiante. Son sommet était formé d’un bulbe arrondi, avec deux courtes antennes en forme de cloche. Elle possédait également des yeux proéminents rappelant ceux des crabes et une petite bouche adaptée pour broyer des feuilles et de l’écorce. En d’autres termes, ce géant préhistorique était un herbivore inoffensif.

Les chercheurs ont noté que l’Arthropleura possédait un corps rappelant celui des mille-pattes modernes, mais avec une tête proche de celle des centipèdes. Il s’agissait donc d’une créature étonnamment hybride, avec des caractéristiques provenant de plusieurs groupes d’arthropodes actuels.

Arthropleura arthropode
Crédits : Mickaël Lhéritier, Jean Vannier et Alexandra Giupponi (LGL-TPE, Université Claude Bernard Lyon 1

Une technique moderne pour explorer le passé

Pour reconstituer l’apparence complète de cet arthropode géant, les chercheurs ont eu recours à une technique avancée appelée tomodensitométrie. Ce procédé, similaire à une radiographie, permet de visualiser l’intérieur des roches sans les endommager. Il est particulièrement utile pour examiner des fossiles fragiles et pour révéler des détails cachés qui ne sont pas immédiatement visibles à l’œil nu.

Grâce à cette méthode, les scientifiques ont pu analyser en profondeur les fossiles des jeunes Arthropleura qui mesuraient environ six centimètres de long. Bien qu’il soit possible que ces spécimens n’aient jamais atteint les tailles gigantesques observées chez certains de leurs congénères adultes, ces fossiles ont tout de même fourni suffisamment d’informations pour estimer à quoi ressemblaient les plus grands individus de cette espèce.

Arthropleura arthropode
Les yeux pédonculés d’Arthropleura, en bleu, peuvent suggérer que les juvéniles ont passé du temps dans l’eau avant de devenir des adultes vivant sur terre. Crédits : Mickaël Lhéritier (LGL-TPE, Université Claude Bernard Lyon 1) et Vincent Fernandez (ESRF))

Un monde très différent

La reconstitution de la tête de l’Arthropleura apporte des éléments cruciaux pour mieux comprendre la vie sur Terre à cette époque lointaine.

Pour rappel, l’animal vivait il y a environ 300 millions d’années, bien avant l’époque des dinosaures. Durant cette période, la Terre connaissait des conditions environnementales très différentes de celles d’aujourd’hui. Les niveaux d’oxygène étaient plus élevés, ce qui a permis à des insectes géants de prospérer. Cette découverte montre à quel point la biodiversité de cette époque était extraordinaire et que les écosystèmes n’avaient rien à envier à ceux des temps modernes.