Essuyant une dépression émotionnelle lors de son séjour à bord de l’ISS en 2018, l’astronaute américaine Serena Auñón-Chancellor aurait percé un trou sur l’un des modules russes afin de revenir plus tôt sur Terre, selon le service d’information public TASS. La NASA réfute ces accusations diffamatoires.
Retour en 2018. Le cosmonaute russe Sergey Prokopyev, l’astronaute de l’Agence spatiale européenne Alexander Gerst et l’astronaute de la NASA Serena Auñón-Chancellor se rendent à bord de l’ISS en juin, à bord du véhicule Soyouz MS-09. Fin août, une brèche de deux millimètres est isolée sur la coque du module orbital du vaisseau. Un tel trou pourrait dépressuriser la station en deux semaines. Très vite, les cosmonautes colmatent le trou. Le vaisseau spatial Soyouz est finalement jugé sûr. Il ramènera son équipage de trois personnes sur Terre en décembre.
Comment ce trou est-il apparu ? Un impact de micrométéoroïde a rapidement été exclu. Certains médias russes ont ensuite rapporté que la brèche avait été causée par un défaut de fabrication ou de test. Si cette théorie est effectivement la plus plausible, certaines sources, au sein du gouvernement russe, ont cependant lancé des rumeurs sans fondement selon lesquelles un astronaute américain pourrait en être à l’origine.
Pour en savoir plus, deux cosmonautes russes ont alors effectué une sortie extravéhiculaire en décembre 2018 pour échantillonner et imager le site où se trouvait le trou. Si les Russes ont terminé leur enquête, ils ne l’ont jamais rendue publique… Avant la semaine dernière.
Le résultat d’une « crise psychologique aiguë »
Au cours d’un entretien suivant la publication de cet article, le journaliste Mikhail Kotov s’est entretenu avec un « responsable de haut rang de l’industrie spatiale russe » resté anonyme. Sur la base des commentaires faits par cette personne, il s’agirait du patron de la société spatiale russe Roscosmos, Dmitry Rogozin, selon Ars Technica.
Les points à retenir de cet échange sont les suivants. Au cours de l’entretien, la personne assure que ce genre de dommages n’aurait pas pu se produire sur Terre, le vaisseau étant testé dans une chambre à vide avant le lancement. « S’il y avait eu un trou, dit-elle, la pression dans le vaisseau aurait chuté rapidement et il n’aurait pas passé le test ».
La personne se focalise ensuite sur l’astronaute Maria Auñón-Chancellor qui, au cours de sa mission en 2018, avait souffert d’une thrombose veineuse profonde. Ce pépin sanitaire aurait pu provoquer, dit-elle, « une crise psychologique aiguë », qui « aurait pu conduire à des tentatives par divers moyens pour accélérer son retour sur la planète ».
En outre, pour une raison inconnue, la caméra capable de filmer la jonction des segments russe et américain ne fonctionnait pas à ce moment-là.
Ensuite, la Russie n’a jamais eu l’occasion d’étudier les outils et la perceuse se trouvant côté américain pour voir s’il elle contenait effectivement des traces de copeaux métalliques de la coque du module orbital russe.
Enfin sur huit trous, un seul a traversé la coque. Les autres étaient des « sauts de perceuse » susceptibles de se produire dans des conditions d’apesanteur sans support nécessaire. Le trou a également été percé dans le cadre (une nervure transversale de la coque du navire), suggérant que celui ou celle qui l’a percé n’était pas formé à la construction du Soyouz MS.

La NASA réfute
L’agence américaine a évidemment réfuté ces dangereuses accusations. « Les astronautes de la NASA, dont Serena Auñón-Chancellor, sont extrêmement respectés, servent leur pays et apportent une contribution inestimable à l’agence », a déclaré Kathy Lueders, chef des vols spatiaux habités de la NASA. « Nous soutenons Serena et sa conduite professionnelle. Nous ne pensons pas qu’il y ait de crédibilité à ces accusations ».
L’idée qu’une astronaute se faufile dans l’espace côté russe pour percer un trou dans la coque d’un module dans le but de rentrer plus tôt sur Terre paraît tout de même absurde. D’autant que le programme de station spatiale de la NASA avait déjà enregistré plusieurs chutes de pressions fin août 2018, et aucun des astronautes américains de la station ne se trouvait à proximité du véhicule Soyouz à ce moment-là. Les responsables américains avaient à l’époque partagé ces données avec les Russes.
Si l’article de TASS écarte la possibilité que le problème se soit produit sur Terre, c’est pourtant la théorie la plus plausible, selon Ars Technica. En effet, un technicien aurait pu accidentellement endommager le vaisseau et chercher à dissimuler cette erreur en appliquant un « patch de fortune ». Cette opération aurait pu permettre au vaisseau de passer le test en chambre à vide sur Terre, avant de finalement céder à cause d’une exposition prolongée en orbite.