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Retour sur la Lune : la fusée SLS devient un gouffre financier

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Décollage de la SLS en novembre 2022. Crédits : Michael Cain / Spaceflight Now / Coldlife Photography

La NASA reçoit de nombreuses critiques en raison des coûts croissants et semble-t-il non maîtrisés de sa fusée Space Launch System (SLS), le cheval de bataille des missions lunaires Artemis.

Une décision avant tout politique

La NASA avait entamé le développement de son lanceur SLS en 2011. À l’époque, ce dernier avait été budgétisé à dix milliards de dollars avec un premier voyage prévu en 2016. Finalement, les problèmes budgétaires, changements de conception et autres obstacles politiques ont repoussé le premier lancement de la fusée à 2022.

Entre-temps, d’autres acteurs de l’aérospatial se sont illustrés, dont SpaceX, qui travaille désormais sur une énorme fusée entièrement réutilisable nommée Starship capable de transporter des humains et du fret vers la Lune. La NASA voit d’ailleurs un potentiel considérable dans ce vaisseau et elle a justement jeté son dévolu dessus pour débarquer ses futurs astronautes sur la Lune dans le cadre des missions Artemis 3 et 4.

Malgré tout, la NASA compte bien s’appuyer sur sa fusée SLS et sa capsule Orion pour envoyer ses astronautes vers la Lune. Dans le cadre de ces prochaines missions, le Starship servira donc d’atterrisseur seulement. Compte tenu du potentiel de ce vaisseau, nous pourrions nous poser cette question : pourquoi la NASA ne veut-elle pas s’appuyer uniquement sur le Starship ?

La réponse est simple : le développement de la SLS engage de nombreuses entreprises américaines disséminées dans de nombreux états. Une énorme partie du budget du programme Artemis est donc distribuée à ces entreprises et à leurs milliers de salariés. Or, maintenir ces emplois est devenu une priorité pour de nombreux membres du Congrès américain afin de renforcer leur position auprès des électeurs.

Sur le papier, nous pourrions comprendre cette approche. Le problème est qu’elle n’est pas viable.

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La SLS décolle dans le ciel de Cap Canaveral le 16 novembre 2022. Crédits : Paul Hennessy

Un gouffre financier

Selon un audit récent réalisé par le Government Accountability Office (GAO), établir une présence permanente et durable sur et autour de la Lune d’ici la fin des années 2020, comme le prévoit la NASA, pourrait en effet être un objectif difficile à atteindre étant donné le coût élevé de la fusée SLS.

Par ailleurs, la NASA a dépensé 11,8 milliards de dollars depuis qu’elle a commencé à développer SLS. Plus de 11 milliards de dollars supplémentaires ont également été alloués dans le cadre de la demande de budget fédéral 2024 de la Maison Blanche pour les travaux futurs sur le lanceur jusqu’en 2028. Cependant, les coûts et les calendriers de base pour ces travaux futurs ne sont pas révisés malgré les préoccupations du GAO depuis près d’une décennie.

En effet, en 2014, cet organisme avait recommandé à la NASA d’établir des bases de référence en matière de coûts et de calendrier pour le programme Artemis. Au lieu de cela, l’agence avait créé une estimation lissée sur cinq ans de ses coûts de production et d’exploitation pour garantir qu’ils s’inscrivent dans son budget global. Or, cette estimation initiale ne reflète pas le coût du programme SLS au fil du temps.

Pour rappel, en 2021, un rapport avait estimé que l’agence finirait par dépenser un total de 93 milliards de dollars pour son programme Artemis entre 2012 et 2025 et que chaque lancement coûterait environ 4,1 milliards de dollars. 

Le rapport note cependant quelques mesures récemment prises par la NASA pour réduire les coûts, notamment le recours à des contrats spécifiques qui font peser le risque sur les entrepreneurs plutôt que sur le gouvernement. Néanmoins, il est encore trop tôt pour déterminer les effets de ces stratégies.