Une étude résout une énigme de longue date concernant l’ancienne calotte scandinave

Crédits : Wikimedia Commons.

Des travaux dirigés par l’Université de l’Arizona (États-Unis) lèvent le voile sur les mécanismes qui ont conduit à la formation de la calotte fennoscandienne lors du dernier âge glaciaire. Ils permettent notamment de comprendre pourquoi celle-ci apparaît plusieurs milliers d’années après l’inlandsis nord-américain. Les résultats ont été publiés dans la revue Nature Geoscience le 9 juin dernier.

Il y a 21 000 ans, la Terre atteignait le pic d’intensité du dernier âge glaciaire initié il y a environ cent mille ans. Le Canada, l’Europe du Nord et une petite partie de la Sibérie étaient alors occupés par de gigantesques calottes de glace épaisses de plusieurs kilomètres. En raison de ce transfert d’eau massif depuis les océans vers les continents, le niveau des mers était 130 mètres plus bas.

Des calottes bien différenciées

Comment se sont développées lesdites calottes ? La question de la phase native de ces mastodontes reste un sujet délicat, car le développement d’un inlandsis est un processus à seuil et la manière précise dont la machine se lance n’est pas triviale. C’est tout particulièrement vrai en ce qui concerne la calotte qui couvrait le nord de l’Europe, aussi appelée calotte fennoscandienne.

En effet, alors que la diminution de l’ensoleillement estival aux hautes latitudes a rapidement initié la calotte Laurentide à partir des glaciers de l’archipel canadien, les choses sont bien différentes en Scandinavie où les températures se maintenaient au-dessus du point de congélation en raison du transport de chaleur par le courant nord-atlantique. Avec ces seuls éléments en jeu, la région aurait donc dû rester en grande partie libre de glace.

calotte glaciaire
Anomalie de température lors du dernier maximum glaciaire il y a 21 000 ans par rapport au climat préindustriel. Les emplacements des calottes Laurentide (Canada et nord des États-Unis) et fennoscandienne (Europe du Nord) sont également visibles. Crédits : Nature.

Découverte d’une nouvelle forme d’interaction entre circulation océanique et calotte glaciaire

Dans une nouvelle étude, des chercheurs ont désormais résolu ce mystère. Les résultats ont été obtenus grâce à l’analyse de sédiments marins et de simulations climatiques intégrant un module de calotte glaciaire à haute résolution. Ils montrent que la formation de la calotte fennoscandienne dépend en grande partie des passages océaniques situés dans l’archipel canadien. Lorsque ceux-ci sont ouverts, des calottes apparaissent au Canada et en Sibérie, mais pas en Scandinavie.

Toutefois, lorsque les passages se ferment, ce qui se produit au moment où l’inlandsis laurentidien s’étend sur l’océan Arctique, le nord de l’Europe se recouvre à son tour d’une vaste couche de glace. Et pour cause, l’eau douce qui passait par les sinuosités de l’archipel canadien est désormais déviée vers l’Atlantique Nord. En se frayant un chemin par l’est du Groenland, elle vient affaiblir le courant nord-atlantique. Ainsi, la Scandinavie se refroidit et s’englace à son tour.

« Ces découvertes sont étayées par les données des sédiments marins de l’Atlantique Nord, qui montrent des preuves de glaciers au nord du Canada plusieurs milliers d’années avant la partie européenne », rapporte Diane Thompson, coauteure de l’étude. « Les enregistrements sédimentaires montrent également des preuves convaincantes d’une circulation océanique profonde affaiblie avant la formation des glaciers en Scandinavie, similaire à nos résultats de modélisation ».

La découverte de cette interaction auparavant inconnue entre la circulation océanique et les calottes glaciaires permet donc de résoudre une apparente contradiction. « Cela peut même aider à expliquer des périodes froides plus courtes telles que la phase froide du Dryas récent il y a 12 900 à 11 700 ans, et le regain rapide de l’inlandsis scandinave à la suite de plusieurs événements chauds lors de la dernière période glaciaire », ajoute Marcus Lofverstrom, auteur principal du papier.