Requin vipère, le Venom des grands fonds

aiguillat commun requin vipère (Trigonognathus kabeyai)
Un aiguillat commun, ou requin vipère (Trigonognathus kabeyai). Source : Twiter

Les profondeurs ocĂ©aniques abritent des crĂ©atures plus Ă©tranges les unes que les autres. Parmi elles figure l’aiguillat commun (ou requin-vipère), un poisson noir aux allures de Venom, l’un des antihĂ©ros de l’univers Marvel.

DĂ©couvert pour la première fois au large des cĂ´tes du Japon en 1986 par un chalutier, l’aiguillat commun (Trigonognathus kabeyai) est une espèce rare de la famille des Etmopteridae (ordre des Squaliformes). C’est Ă©galement le seul membre existant de son genre. Il se retrouve dans l’ouest de l’ocĂ©an Pacifique Nord du Japon, de TaĂŻwan et d’HawaĂŻ. Ce poisson est connu grâce aux rares spĂ©cimens capturĂ©s (moins d’une cinquantaine), le plus grand d’entre eux mesurant un peu plus de cinquante-trois centimètres de long.

Physiquement, ces poissons sont essentiellement noirs Ă  l’exception de leurs nageoires translucides. Nous savons Ă©galement qu’ils « brillent » dans le noir grâce Ă  des cellules productrices de lumière (photophores) situĂ©es sur et sous la tĂŞte. Ils vivent essentiellement Ă  environ 270 Ă  360 mètres de profondeur. Cependant, plusieurs spĂ©cimens ont Ă©tĂ© rĂ©cupĂ©rĂ©s Ă  près de 1 500 mètres. On suppose donc que ces poissons s’enfoncent plus profondĂ©ment pour se nourrir (comme beaucoup d’espèces des grands fonds). CĂ´tĂ© proies, cette espèce chasserait principalement les poissons-lanternes et les crustacĂ©s, avant de remonter la colonne d’eau, probablement la nuit.

CotĂ© prĂ©dateurs, les chercheurs pensent que l’aiguillat est ciblĂ© par le thon obèse (Thunnus obesus) et le pomfret faucille (Taractichthys steindachneri), car des spĂ©cimens ont dĂ©jĂ  Ă©tĂ© rĂ©cupĂ©rĂ©s dans l’estomac de ces deux espèces.

Des mâchoires protractiles

Avec leurs dents en forme d’aiguille et leurs grands yeux, beaucoup comparent cet Ă©trange poisson des profondeurs avec le personnage de Marvel, Venom. Cependant, la caractĂ©ristique la plus intĂ©ressante de cette espèce est sans aucun doute ses mâchoires protractiles. Il est en effet capable de projeter sa mâchoire en avant Ă  la manière du requin-lutin ou requin-gobelin (Mitsukurina owstoni). Cette caractĂ©ristique permet Ă  ces poissons de manger des espèces de proies de toutes les tailles.

Ces poissons restent malgrĂ© tout très rares, si bien que l’on ignore encore beaucoup de choses Ă  leur sujet. On ne connaĂ®t par exemple par leur durĂ©e de vie ni leur comportement en matière de reproduction. On pense nĂ©anmoins qu’il s’agit d’un vivipare aplacentaire (ovovivipare).

Ă€ mesure que les pĂŞcheries gagnent en profondeur, de plus en plus de spĂ©cimens pourraient ĂŞtre dĂ©couverts Ă  l’avenir. Ă€ partir de lĂ , les scientifiques pourront en apprendre davantage. Naturellement, la Liste rouge de l’UICN a placĂ© l’Ă©tiquette « DonnĂ©es incomplètes ».