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Des reins humains cultivés dans des embryons de porc pour la première fois. Pourquoi c’est important ?

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Coupe transversale d'un embryon de porc. Crédits : klickit24/istock

Une équipe de chercheurs annonce avoir développé des reins humains à un stade précoce après avoir inséré des cellules souches humaines dans des embryons de porc génétiquement modifiés. La recherche en est encore à ses débuts, mais une telle approche pourrait un jour contribuer à pallier la pénurie d’organes humains nécessaires à la transplantation. 

Qu’est-ce que la xénotransplantation ?

La pénurie d’organes pour la transplantation est un problème mondial majeur. On relève en effet une forte demande en raison de la prévalence croissante de maladies chroniques, telles que les maladies cardiaques, rénales et pulmonaires, mais une offre d’organes limitée. Pour cette raison, les scientifiques explorent différentes approches pour y remédier.

L’une d’elles implique de développer des organes humains dans des animaux donneurs, généralement des porcs. Ces derniers sont privilégiés, car leurs organes sont similaires aux nôtres, tout comme leur développement embryonnaire. On parle alors de xénotransplantation. Cette méthode est encore en phase de recherche et de développement. Il reste donc encore de nombreux défis à surmonter. Toutefois, il y a du progrès, comme en témoigne cette nouvelle étude dirigée par des chercheurs des Instituts de biomédecine et de santé de Guangzhou, en chine.

Des reins humains cultivés dans des embryons porcins

Dans le cadre d’expériences précédentes, des scientifiques avaient récolté des reins et des coeurs de porcs génétiquement modifiés pour les transplanter chez des donneurs d’organes en état de mort cérébrale. Cependant, cette stratégie comporte un risque élevé que le corps humain rejette les organes de porc.

Ces nouveaux travaux visaient à limiter ce problème en intégrant d’abord des cellules humaines dans les tissus receveurs de manière à pouvoir cultiver des organes humains chez le porc. L’équipe a choisi de travailler sur les reins qui figurent parmi les organes les plus fréquemment transplantés.

Ce type d’approche implique d’intégrer des cellules souches humaines capables de se développer en n’importe quel type de cellule (cellules souches pluripotentes induites) dans les embryons de porcs. Néanmoins, le défi est que les cellules porcines de l’embryon peuvent facilement supplanter les cellules humaines. Elles nécessitent ensuite des nutriments et des signaux chimiques différents pour se développer. Ici, les chercheurs ont surmonté ces défis en utilisant la technologie CRISPR pour désactiver deux gènes qui auraient normalement permis aux cellules embryonnaires de porc de développer des reins.

Les chercheurs ont également manipulé les cellules humaines de manière à ce qu’elles soient plus susceptibles de s’intégrer aux cellules de porc en correspondant à leur stade de développement. Sans cet ajustement, les cellules humaines auraient en effet été en avance sur le plan du développement par rapport à leurs homologues porcines.

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Les reins de cet embryon de porc sont en grande partie composés de cellules humaines (rouges) dérivées de cellules souches. Crédits : J. Wang et coll./Cell Stem Cell 2023

Une expérience prometteuse

L’équipe a finalement implanté 1 820 embryons chimériques chez treize truies de substitution. Ils ont ensuite interrompu les grossesses et extrait les embryons 28 jours plus tard. Parmi ceux-ci, cinq embryons contenaient des reins à un stade précoce constitués d’environ 50 à 60 % de cellules humaines et « structurellement normaux » pour ce stade de développement. Si elles avaient été maintenues, certaines de ces cellules auraient notamment pu former des uretères, les structures en forme de tube qui relient le rein à la vessie.

Encore une fois, ce type d’approche est encore loin d’être appliquée à la transplantation d’organes humains. Le problème du rejet immunitaire se posera en effet toujours, car les reins créés par l’équipe contenaient encore des cellules dérivées du porc, telles que celles qui composent les vaisseaux sanguins. En outre, de nombreux embryons de porc ont également fini par dégénérer au cours de cette étude; détaillée dans la revue Cell Stem Cell.