Il existe de nombreuses idées reçues concernant les femmes et les règles. Si la plupart portent sur le fait que les menstruations rendent ces dames plus à cran, beaucoup voient aussi cette période du cycle féminin comme physiquement incapacitante, et ce, notamment du fait des douleurs menstruelles (ou dysménorrhée) peuvent s’avérer incapacitantes pour les activités du quotidien. Pourtant, une nouvelle étude britannique publiée dans la revue Neuropsychologia le 17 mai fournit un éclairage à contre-courant. Moins d’erreurs, plus de précision, meilleur temps de réaction… Les résultats de ces travaux montrent en effet que pendant leurs règles, les femmes deviennent plus performantes et réactives sur le plan cognitif.
Un biais exploré dans cette nouvelle étude
En se basant sur des recherches scientifiques menées par le passé, la médecine du sport estime que les sportives sont plus à risque de subir des blessures musculosquelettiques pendant ce que l’on appelle la phase lutéale de leur cycle menstruel (à savoir la période qui s’étend de douze à quatorze jours avant l’arrivée des règles) en raison des changements hormonaux à l’œuvre.
Et comme l’expliquent des chercheurs de la prestigieuse University College de Londres dans leur étude : « Un ensemble de travaux distincts suggère que la cognition spatiale pourrait également fluctuer de la même manière. Les changements dans la cognition spatiale pourraient, en théorie, être un facteur de risque de blessure, en particulier dans les sports rapides qui nécessitent une précision de l’ordre de la milliseconde dans les interactions avec des objets en mouvement dans l’environnement. Cependant, les théories existantes entourant les causes du risque accru de blessures chez les femmes en période de règles se concentrent largement sur les mécanismes biomécaniques, avec peu de considération sur les déterminants cognitifs possibles du risque de blessures ».
Aussi, ils ont ici cherché à étudier plus en détail l’effet des menstruations sur les performances purement cognitives des femmes et les fluctuations à l’œuvre tout au long du cycle menstruel.
Des performances étudiées avec et sans les règles
Pour réaliser ces travaux, les scientifiques ont ici recruté 241 individus, dont 96 hommes à titre comparatif ainsi que 47 femmes qui n’avaient pas régulièrement leurs règles à cause de leur contraception. Ils leur ont ensuite fait subir une batterie de tests cognitifs à deux semaines d’intervalle assortis à chaque fois d’une grille d’évaluation de leur humeur ainsi que d’un questionnaire sur leurs symptômes menstruels. Les tests visaient ici principalement à imiter les processus mentaux typiques des sports d’équipe et évaluer la capacité à comprendre les informations visuelles.
Par exemple, pour étudier l’attention, la précision et le temps de réaction des participants, ces derniers devaient cliquer lorsqu’ils voyaient des visages souriants ou clignant de l’œil qui s’affichaient à l’écran. Au cours d’un autre test visant cette fois à évaluer leur cognition spatiale, tous devaient cette fois identifier des images miroirs dans une tâche de rotation 3D. Pour mesurer leur timing spatial et leur talent d’anticipation, il leur était aussi demandé de cliquer au moment où deux balles entraient en collision sur l’écran.
Des applications pour permettre le suivi des règles et estimer à quel moment les femmes se trouvaient dans leur cycle au moment des tests ont aussi été utilisées pour plus de précision.
De meilleurs résultats pendant les règles
Si les résultats de ces tests ne montrent aucune différence significative entre les hommes et les femmes concernant le temps de réaction ou la précision, ils démontrent en revanche que les femmes qui ont leurs règles naturellement obtiennent de meilleurs scores cognitifs globaux pendant cette période de leur cycle et commettaient moins d’erreurs. En outre, si les femmes pouvaient déclarer se sentir moins bien en présence de leurs saignements et se percevoir comme moins performantes à cause des règles, les données ici obtenues leur donnent finalement tort. Par exemple, leur timing était en moyenne dix millisecondes plus précis pendant le test qui consistait à déplacer une balle en période de règles.
A contrario, leur score devenait moins bon pendant la phase lutéale, soit avant les menstrues. Ces différences pourraient, selon les chercheurs, s’expliquer par le taux d’œstrogènes, une hormone qui augmente pendant les règles et qui viendrait ici stimuler la fonction cérébrale.
Des informations importantes
Comme l’affirme la Dre Flaminia Ronca, l’autrice principale de l’étude qui fait partie de la Division de chirurgie et des sciences interventionnelles de l’UCL et de l’ISEH : « ce qui est surprenant, c’est que les performances des participantes étaient meilleures lorsqu’elles avaient leurs règles, ce qui remet en question ce que les femmes, et peut-être la société en général, supposent de leurs capacités à ce moment particulier du mois. […] J’espère que cela servira de base à des conversations positives entre entraîneurs et athlètes sur les perceptions et les performances : ce que nous ressentons ne reflète pas toujours nos performances. »
« Il existe de nombreuses preuves anecdotiques provenant de femmes selon lesquelles elles pourraient se sentir maladroites juste avant l’ovulation, par exemple, ce qui est étayé par nos conclusions ici. J’espère que si les femmes comprennent comment leur cerveau et leur corps changent au cours du mois, cela les aidera à s’adapter », ajoute la Dre Megan Lowery, co-autrice de l’étude.
Vous pouvez lire l’étude au complet en suivant ce lien.