Les sols arides sont préservés de l’érosion éolienne par une « biocroûte » dont le rôle est de limiter la quantité de poussière présente dans l’atmosphère. Or, cette même biocroûte fait face à une importante menace : le réchauffement climatique. Durant les cinquante prochaines années, la quantité de poussière dans l’atmosphère devrait faire l’objet d’une augmentation loin d’être négligeable et dont les effets sont encore difficiles à évaluer.
Érosion des sols arides et poussière atmosphérique
Le terme « biocroûte » est relatif à une croûte biotique terrestre qui couvre environ 12 % de la surface terrestre. Il s’agit d’une couche vivante représentant la partie dite superficielle des sols et, le plus souvent, les sols arides. Elle se compose principalement de mousses, de lichens et de cyanobactéries diverses. En jouant un rôle prépondérant dans la fixation du carbone et de l’azote ainsi que dans la stabilisation des sols, la biocroûte participe grandement aux écosystèmes arides.
Il s’avère que la croûte biotique terrestre prévient l’érosion des sols arides par les vents et réduit par la même occasion les quantités de poussière atteignant l’atmosphère. Néanmoins, l’impact réel de la biocroûte sur le cycle de la poussière dans l’atmosphère est assez méconnu. Une étude publiée dans la revue Nature Geoscience et menée par différents départements du Max Planck Institute (Allemagne) a permis d’en savoir plus sur ce phénomène.
Faisant partie de la liste des aérosols agissant sur le système climatique, la poussière atmosphérique provient principalement de l’érosion éolienne des sols arides. Capables de voyager sur d’importantes distances grâce aux courants atmosphériques, ces petits grains ne sont pas anodins. En effet, ils sont capables de modifier les propriétés optiques de l’atmosphère. En effet, la poussière disperse le rayonnement solaire descendant et absorbe certaines longueurs d’ondes qu’émettent les sols. Par ailleurs, elle influe également sur la formation des nuages.

Un phénomène sur lequel plane une menace
Complexe et préoccupant, le voyage des grains de poussière peut avoir des retombées néfastes pour la santé humaine ainsi que pour certains écosystèmes. Mais à quel point la biocroûte permet-elle de réguler cet impact et comment le réchauffement climatique vient-il perturber cette régulation ? Grâce à leur étude, les scientifiques ont fourni des résultats qui montrent que la biocroûte empêche l’émission dans l’atmosphère d’environ 700 000 tonnes de poussière par an. Autrement dit, cette couche vivante permet de réduire de 60 % la quantité de poussière dans l’atmosphère.
Malheureusement, le réchauffement climatique met à mal cette biocroûte, tout comme la surexploitation des sols. Selon les chercheurs, la surface recouverte par cette couche aura diminué de 25 à 40 % d’ici à 2070. Ainsi, en laissant l’érosion éolienne des sols reprendre le dessus, la quantité de poussière gagnant l’atmosphère devrait augmenter de 15 %. Or, cette augmentation pourrait avoir d’importantes conséquences sur le climat.
Pour l’instant, les conséquences climatiques de l’augmentation des quantités de poussière dans l’atmosphère sont difficiles à évaluer. Toutefois, les scientifiques estiment que le phénomène aura un fort impact sur la formation des nuages et ainsi, sur les précipitations. De plus, davantage de poussière accumulée au niveau des glaciers et autres calottes glaciaires pourrait précipiter leur fonte. L’optimisme n’est pas non plus de mise en ce qui concerne les différents cycles biogéochimiques ainsi que la santé humaine.