Il s’agit d’un genre de tour de passe-passe essentiel au développement de la réalité virtuelle. Le principe de « marche redirigée » devrait être utilisé dans l’univers carcéral dans un avenir assez proche, mais pas seulement.
Vers 2050, les prisons seront peut-être l’endroit où la réalité virtuelle induira les plus étranges comportements. Lors des promenades, plusieurs détenus marcheront la main posée sur une paroi autour d’une structure ovoïdale (en forme d’œuf) de 7 X 5 mètres, équipés d’un casque de réalité virtuelle. Et pourtant, ils ne se rendront jamais compte qu’ils tourneront sans jamais croiser les autres prisonniers, et penseront que leur chemin n’est qu’une ligne droite sans fin.
Le concept technologique qui permet cela n’est autre que la marche redirigée ou en anglais Redirected Walking (RDW), un des piliers du développement de la réalité virtuelle. Un peu compliqué à détailler, ce concept a toutefois été expliqué par le site The Verge. Tout d’abord, il faut savoir que l’être humain est incapable d’estimer les distances lorsqu’il a les yeux bandés, ce fait a été prouvé par de nombreuses études, et ce bien avant l’apparition de la réalité virtuelle.
Notre cerveau tolère sans trop de problèmes le fait qu’on lui fasse croire qu’il se déplace en ligne droite, alors que sa trajectoire est courbée, à partir du moment où l’espace est visible à l’œil nu. De plus, il est très difficile d’appréhender le déplacement d’un objet que l’on ne voit pas « en direct ». Ainsi, notre cerveau tend à faire totalement confiance, et de manière aveugle, à notre vue, pour ce qui est de l’appréciation de notre environnement, et ce au détriment de l’intégralité de nos autres sens.
Cette faille sensorielle est donc le cheval de bataille du concept de marche redirigée, afin de définir des trajectoires artificielles. Cependant, le plus important réside dans le timing puisqu’au moindre ralentissement (lag), la personne équipée se retrouve dans un état de fort dérangement (migraine aiguë).
La marche redirigée fait encore l’objet de recherches et s’est retrouvée face à un obstacle : s’il est bel et bien possible de faire marcher un humain en cercle indéfiniment en le trompant de la sorte, il faudrait une structure mesurant 44 mètres de diamètre au minimum, ce qui est très encombrant. Cependant, comme dans tous les champs de recherche, les barrières tombent petit à petit.
En mai 2016, une expérience vidéo baptisée Unlimited Corridor (corridor illimité) menée par l’université de Tokyo (Japon) a prouvé qu’il est possible de faire fonctionner la marche redirigée autour d’une structure de 7 mètres sur 5 seulement. Les trois personnes testées simultanément étaient équipées d’un gant haptique, leur permettant de toucher ce qui correspond au décor virtuel. Il s’agit de confirmer au cerveau que la prise d’information initialement effectuée par la vue est bien exacte.
Il s’agit d’une seconde tromperie pour notre cerveau, et surtout deux fois plus efficace ! De plus, la simulation contrôle l’ouverture et la fermeture d’une porte virtuelle, faisant en sorte que les trois personnes ne puissent jamais se croiser, plongées dans une errance totale et solitaire.
Côté application, nous pensons évidemment à l’univers carcéral, et il est vrai que nous pouvons y voir des intérêts (promenades sans accrocs, réduction des effectifs de surveillance, etc.). Cependant, ce genre d’expérience de réalité virtuelle totale pourrait par exemple se retrouver dans le parc d’attractions virtuelles The Void dans le cadre d’une chasse aux aliens.
À suivre !
Voici l’expérience menée à l’université de Tokyo :
Sources : The Verge – Motherboard