Quelque chose de mystérieux crée ce motif depuis 500 millions d’années

Paleodictyon
Paleodictyon se cache peut-être encore au fond de l’océan. Crédit : Vasyl Rohan

Depuis des millions d’années, la Terre a connu une multitude de formes de vie, certaines ayant laissé des traces fascinantes et mystérieuses. Parmi elles, les motifs géométriques connus sous le nom de Paleodictyon nodosum émergent comme un véritable mystère. Découverts dans des sédiments marins datant de centaines de millions d’années, ces fossiles en forme de nid d’abeilles ont suscité l’intérêt des scientifiques, mais leur créateur reste encore à identifier.

La découverte de Paleodictyon

Les premières mentions de Paleodictyon remontent au grand maître de la Renaissance, Léonard de Vinci. Dans son Manuscrit de Paris I, ce dernier esquissa en effet plusieurs fossiles marins, dont certains présentent des motifs hexagonaux distincts. Ces dessins témoignent non seulement de son intérêt pour la biologie et la paléontologie, mais également de sa capacité à observer et à représenter la nature avec une précision remarquable.

Par rapport aux connaissances scientifiques du XIVe et XVe siècles, de Vinci était en avance sur son temps. À une époque où la compréhension des fossiles était encore embryonnaire, ses croquis jetèrent en effet les bases de l’étude paléontologique future. Bien que Paleodictyon n’ait pas été identifié comme tel à l’époque, ses représentations ont ouvert la voie à des réflexions sur la vie marine ancienne et les interactions entre les organismes et leur environnement.

Ce n’est en effet qu’au cours des siècles suivants que les scientifiques ont pu établir un lien entre ces dessins et un organisme vivant. Les premières traces physiques de Paleodictyon ont été découvertes dans des roches sédimentaires de l’Éocène, il y a environ 55 à 35 millions d’années. Ces structures se caractérisent par un réseau complexe de tunnels et de puits, formant une configuration en nid d’abeilles.

Des découvertes ultérieures ont ensuite révélé que Paleodictyon existait bien avant l’Éocène, avec des spécimens datant de la période cambrienne, il y a environ 500 millions d’années. Ce fossile a été retrouvé dans diverses régions d’Europe, notamment dans des sédiments autrefois marins, mais aujourd’hui asséchés. Une question persiste alors : ces motifs sont-ils le résultat d’une activité biologique ou simplement une empreinte laissée par une créature disparue ?

Paleodictyon
Crédits : Vasyl Rohan/istock

Quelques hypothèses

La nature énigmatique de Paleodictyon a conduit à l’émergence de plusieurs hypothèses concernant son origine. L’une des idées avancées par les chercheurs est que ces structures pourraient avoir été produites par des organismes ressemblant à des éponges de verre ou par des xénophyophores, des créatures unicellulaires géantes qui vivent dans les profondeurs marines. Ces organismes pourraient avoir creusé des tunnels dans les sédiments, laissant derrière eux des empreintes reconnaissables.

Une autre théorie suggère que les réseaux en nid d’abeilles sont en réalité des restes de nids abandonnés créés par des organismes fouisseurs qui se frayent un chemin à travers les sédiments. Cette hypothèse repose sur l’idée que ces créatures à l’état juvénile pourraient interagir avec leur environnement d’une manière qui laisserait ces motifs derrière eux.

Enfin, une troisième explication envisage que ces terriers souterrains pourraient fonctionner comme des « fermes » créées par un ver fouisseur conçues pour piéger et cultiver des bactéries. Cela impliquerait une relation symbiotique où le ver bénéficierait de la présence des bactéries tout en fournissant un habitat propice à leur développement.

Un mystère persistant

Cependant, toutes ces théories ont leurs limites. D’une part, bien qu’il existe des similitudes dans les structures, les fossiles ne contiennent aucune trace d’ADN ou d’autres biomatériaux qui pourraient confirmer leur association avec ces types d’organismes.

De plus, l’idée que ces motifs représentent des nids abandonnés ou des terriers fouisseurs repose sur des conjectures plutôt que sur des preuves directes. Les chercheurs n’ont pas encore observé des comportements similaires chez les organismes marins actuels, ce qui rend difficile l’établissement d’un lien direct avec Paleodictyon.

Enfin, la théorie des terriers comme « fermes » de bactéries présente également des limites. Bien qu’elle soit séduisante sur le plan conceptuel, elle manque de validation empirique. Les échantillons prélevés dans des environnements océaniques profonds, où des structures similaires ont été découvertes, étaient dépourvus d’organismes, ce qui soulève des questions sur la façon dont ces terriers pourraient avoir été utilisés et par qui.

Des découvertes faites dans les années 1970 sur la dorsale médio-atlantique ont également ajouté une couche d’intrigue : des réseaux de tunnels similaires ont en effet été trouvés dans des échantillons prélevés à 3 500 mètres de profondeur, mais sans organismes vivants ou traces d’ADN. Cette observation a laissé les chercheurs perplexes, renforçant l’idée que la source de ces motifs pourrait encore échapper à notre compréhension.