Quelle est l’histoire de nos origines cosmiques ?

Crédits : iStock

Il y a près de 70 ans, l’astronome Paul Merrill, observant la lumière provenant d’une étoile lointaine, reconnut les signatures du technétium. C’était inattendu. Le technétium est un élément instable et artificiel, qui aurait normalement dû se transformer en un élément différent, tel que le ruthénium ou le molybdène, il y a très longtemps. Comment alors était-ce possible ?

Le 2 mai 1952, Merrill rapporta sa découverte dans la revue Science. Il suggéra alors une explication possible : les étoiles créent des éléments lourds. Le chercheur avait ici non seulement expliqué une observation déroutante, mais avait aussi ouvert la voie à la compréhension de nos origines cosmiques. Peu de découvertes scientifiques modifient complètement notre vision du monde – mais celle-ci l’a fait. L’image nouvellement révélée de l’Univers était simplement hallucinante, et les répercussions de cette découverte continuent aujourd’hui de guider la recherche en science nucléaire.

Au début des années 1950, on ne savait toujours pas comment les éléments qui composent notre Univers, notre système solaire et même nos corps humains, avaient été créés. Au départ, la version la plus populaire était qu’ils étaient tous issus du Big Bang. Les premiers scénarios alternatifs ont été développés par des scientifiques de renom de l’époque, comme Hans Bethe (prix Nobel de physique, 1967), Carl Friedrich von Weizsäcker (Max-Plank Medal, 1957) et Fred Hoyle (Royal Medal, 1974). Mais personne n’avait vraiment trouvé de théorie convaincante sur l’origine des éléments – jusqu’à l’observation de Paul Merrill.

La découverte de Merrill a marqué la naissance d’un domaine complètement nouveau : la nucléosynthèse stellaire, ou l’étude de la façon dont les éléments – ou plus précisément leurs noyaux atomiques – sont synthétisés dans les étoiles.

Il n’a pas fallu longtemps aux scientifiques pour commencer à comprendre ce que le processus de synthèse des éléments dans les étoiles impliquait. Petit à petit, les processus nucléaires en cours dans les étoiles transforment les atomes d’hydrogène en abondance en éléments plus lourds, allant de l’hélium au carbone, en passant par le technétium et d’autres. Quatre éminents physiciens nucléaires de l’époque : Margaret Burbidge (Prix mondial Albert Einstein des sciences, 1988), Geoffrey Burbidge (Bruce Medal, 1999), William Fowler (Prix Nobel de physique, 1983) et Fred Hoyle (Royal Medal, 1974) publièrent alors en 1957 la Synthèse des éléments dans les étoiles. La publication reste encore une référence pour décrire les processus astrophysiques dans les étoiles.

Les étoiles sont lourdes. On pourrait penser qu’elles s’effondreraient complètement sur elles-mêmes à cause de leur propre gravité – mais elles ne le font pas. Ce qui empêche cet effondrement, ce sont les réactions de fusion nucléaire qui se produisent au centre de l’étoile.

Dans une étoile, vous retrouverez des milliards et des milliards d’atomes, dont certains se heurtent. Au début cependant, l’étoile est trop froide : quand les noyaux des atomes se heurtent, ils rebondissent simplement l’un sur l’autre. Mais plus l’étoile se comprime à cause de sa gravité, plus la température en son centre augmente. Les noyaux qui se rencontrent peuvent alors fusionner. C’est ce que les physiciens appellent une réaction de fusion nucléaire.

Ces réactions nucléaires ont deux buts. D’abord, elles libèrent de l’énergie qui permet de chauffer l’étoile, fournissant la pression extérieure qui empêche son effondrement gravitationnel. C’est ainsi que l’étoile maintient un certain équilibre pendant des milliards d’années. Deuxièmement, ils fusionnent les éléments légers en éléments plus lourds, comme le technétium observé par Merrill, mais également le calcium de nos os et l’or de nos bijoux.

Voici plus de 60 ans que les physiciens travaillent à comprendre les réactions nucléaires en cours dans les étoiles. Il existe aujourd’hui de nombreuses autres façons d’observer les signatures de la création d’éléments à travers l’Univers. De très vieilles étoiles, par exemple, enregistrent la composition de l’Univers au moment de leur formation. Étudier les vieilles étoiles, c’est étudier l’histoire de la synthèse d’éléments dans notre Galaxie, de sa formation peu de temps après le Big Bang à aujourd’hui.

Source