Que ferons-nous des morts sur Mars ?

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Crédits : Chelsea Gohd

Un chercheur et une créatrice de mode se sont associés dans le but de réfléchir à l’un des problèmes les moins discutés auxquels seront confrontés les futurs colons sur Mars : que faire des corps de leurs compagnons décédés ?

Il n’aura échappé à personne que des agences publiques, comme la NASA, et privées, comme SpaceX, ambitionnent de s’établir durablement sur Mars. Envoyer des Hommes sur la planète rouge ne sera pas facile. Nous allons en effet devoir surmonter les plus grands défis techniques de notre histoire. Mais il y a des sujets dont on parle moins, et qui sont pourtant très importants, comme la mort.

En effet, sur une planète aussi lointaine, celles et ceux qui seront sur place devront aussi y laisser leur vie. Mais une question se pose alors : que faire des corps ?

Accompagner les morts

Sur Mars comme sur Terre, nous aurons probablement des approches respectueuses des défunts. Mais encore faut-il y réfléchir.

En ce sens, le bio-ingénieur JJ Hastings, qui a récemment participé à une mission martienne simulée à Hawaï, s’est associé à la styliste Pia Interlandi, spécialisée dans la conception de vêtements d’enterrement biodégradables. Le but : conceptualiser le processus de mort et de deuil sur Mars d’une manière qui s’aligne sur nos sensibilités humaines.

Ensemble, ils ont alors imaginé des vêtements de mort martiens capables à la fois de rendre hommage aux défunts, mais également de permettre aux proches de pouvoir vivre le processus de deuil.

Ceux-ci se composeraient en quatre couches fabriquées à partir de protéines de soie biodégradables.

La première couche serait un sous-vêtement blanc qui reposerait directement sur le corps du défunt. Au-dessus de cette couche de base viendrait ensuite se placer une deuxième couche, censée être plus décorative.  La troisième couche de vêtement, très légère, viendrait ensuite couvrir le visage du défunt. Enfin un dernier grand voile – une sorte de couverture – viendrait se déposer sur le tout.

Pia Interlandi explique avoir imaginé un vêtement multicouches dans le but de rendre hommage aux rituels funéraires et de deuil de diverses cultures.

C’est également, pour elle, une manière beaucoup plus douce de dire au revoir. « La fermeture d’un cercueil est souvent trop brusque, trop dure et trop soudaine, explique-t-elle. Nous devrions suivre un processus au cours duquel nous pourrions lentement voiler le corps du défunt, pour faire nos adieux ».

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JJ Hastings s’entraîne « à mourir » avec les vêtements spécialement conçus par la créatrice de mode Pia Interlandi. Crédits : Chelsea Gohd / Space.com

Recycler les défunts

En revanche sur Mars, une fois le rituel passé, vous ne pouvez pas enterrer les morts, car aucune bactérie ne se chargera de les décomposer. C’est pourquoi les deux compères ont imaginé une seconde phase qui visera grossièrement à « recycler » les cadavres des défunts.

Oui, c’est glauque, mais sur Mars vous ne pouvez pas aller faire les courses tous les deux jours. Toutes les ressources seront donc très précieuses. Et des ressources, le corps humain en regorge. Du sel et autres minéraux au carbone, en passant par l’eau et bien plus encore, nos corps sont en effet constitués de nombreuses matières premières qui pourraient être réutilisées par les colons martiens.

Le projet de Hastings et Interlandi ne dévoile pas énormément de détails à ce sujet, mais nous savons qu’ils explorent le processus d’hydrolyse alcaline. Sur Terre, c’est une alternative à l’enterrement et à la crémation.

La technique – légale dans certains états des États-Unis et au Canada – consiste essentiellement à placer le corps des défunts dans un bain chimique composé de potassium et de sodium, puis à le chauffer à une température oscillant entre 95 et 150 °C. Le processus, qui dure entre 5 à 10 heures, dissout alors les protéines, le sang et la graisse présents à l’intérieur du corps.

Au final, il ne reste qu’un liquide couleur café. Les restes qui n’ont pu être dissous, comme les fragments d’os, sont ensuite réduits en cendres grâce au même procédé que celui des crématoriums.

L’ensemble du processus paraît macabre, mais la minimisation des déchets sera un aspect très important de la durabilité d’une colonie sur Mars. Et selon Pia Interlandi, une fois la liquéfaction des corps opérée, les restes pourraient également être utilisés comme engrais pour nourrir les plantes en croissance.

Sur Mars, rien ne se perd.

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