Quand un crapaud se déguise en vipère pour éviter les prédateurs

Crédits : Konrad Mebert

Un crapaud retrouvé en République démocratique du Congo semble vouloir imiter l’une des plus grandes vipères d’Afrique pour échapper aux prédateurs. Physiquement, mais aussi dans le comportement.

Le mimétisme batésien consiste, pour un organisme inoffensif, à imiter un organisme nocif. Cette stratégie est utilisée par de nombreuses créatures, mais elle reste plutôt rare chez les amphibiens. Récemment, des chercheurs ont eu l’occasion d’observer un crapaud géant congolais (Sclerophrys channingi), en République Démocratique du Congo, se muer en un serpent extrêmement dangereux : la vipère du Gabon.

« Il s’agit du premier exemple au monde, à notre connaissance, d’un crapaud qui tente d’imiter un serpent venimeux, explique Eli Greenbaum de l’Université du Texas à El Paso. Il est rare que les ces amphibiens soient impliqués dans un complexe de mimétisme en général ».

Mimétisme physique

C’est une élève, Theresa Edmondston, qui fit remarquer au chercheur lors d’un cours de biologie en 2017 la ressemblance du crapaud avec la vipère du Gabon (Bitis gabonica). Intrigué, Eli Greenbaum a commencé à étudier les deux espèces de plus près. « Au fil du temps, il m’est alors apparu clairement qu’il existait une similarité intrigante », explique-t-il.

Comme on peut le voir ci-dessous, les motifs de couleurs du crapaud ressemblent effectivement à ceux de la tête de la vipère. On remarque notamment les taches brunes et la bande, foncée elle aussi, qui s’étend le long du crapaud. La peau de ce dernier paraît également extraordinairement lisse, notamment sur le dos. Elle est habituellement rugueuse et verruqueuse chez d’autres espèces de crapauds.

crapaud
Le crapaud à gauche, et la tête de la vipère à droite. Crédits : Taylor & Francis

Jusque dans le sifflement

Mais ce n’est pas tout. Le chercheur, au cours de ses travaux, s’est également entretenu avec le biologiste Chifundera Kusamba, du Centre de recherche en sciences naturelles à Lwiro, en République démocratique du Congo. « Il a mentionné par hasard, comme une remarque désinvolte, que lorsque vous rencontrez ces créatures dans la nature, elles émettent un petit sifflement qui ressemble à de l’air sortant lentement d’un ballon ».

Pour le chercheur, ces crapauds, en plus d’imiter le physique des vipères, pourraient alors également tenter de reproduire leurs sifflements.

Il a aussi été remarqué que les amphibiens vivaient généralement près des vipères dans le pays. Ce qui renforce l’idée d’un mimétisme batésien. Si aucun de ces reptiles n’évoluait dans le coin, les crapauds ne pourraient en effet effrayer personne. Puisque les prédateurs potentiels n’auraient jamais eu l’occasion de se familiariser avec le venin de la vipère.

Les détails de l’étude ont été publiés dans le Journal of Natural History.

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