Des résultats établis expérimentalement par une équipe de chercheurs israéliens indiquent que lorsqu’elle est affectée par un virus, l’espèce Emiliania huxleyi du phytoplancton perd sa coquille. Des fragments finissent ainsi par se retrouver dans l’atmosphère, l’enrichissant en aérosols. Une fois dans l’air, ces particules agissent comme des réflecteurs du rayonnement solaire, et seraient même en mesure de modifier les propriétés des nuages.
L’atmosphère est remplie de fines particules liquides ou solides en suspension dans l’air que l’on appelle des aérosols*. Ceux-ci jouent un grand rôle sur l’albédo de notre planète – la capacité qu’elle a à réfléchir le rayonnement incident – à la fois par effet direct sur les rayons solaires entrants mais également via la formation des nuages, car ces aérosols agissent comme des noyaux de condensation. Il s’avère que dans le cas d’une atmosphère hypothétique totalement pure, la condensation responsable de l’apparition des gouttelettes nuageuses ou des cristaux de glace ne se produirait que pour des taux de sursaturation très élevés. Dans les conditions actuelles, l’humidité relative ne dépasse que très rarement les 104 à 105 %. Sans le moindre aérosol, cette valeur atteindrait 400 à 500 % avant condensation de la vapeur d’eau. On parle de nucléation hétérogène lorsque des particules stimulent la condensation, et de nucléation homogène dans le cas contraire.
Les aérosols d’origine marine issus de l’éclatement de bulles d’air à la surface de l’océan sont l’un des principaux contributeurs à la masse d’aérosols présente dans l’atmosphère de la Terre. Ce processus dissémine dans l’air de fines particules de sel et des fragments de micro-organismes marins tels que des bactéries, des virus ou du phytoplancton. Malgré de nombreuses recherches sur le rôle de l’activité biologique dans la production d’aérosols marins, il reste de nombreuses questions non résolues. Dans la continuité de ces recherches, des résultats établis expérimentalement et publiés le 15 août par des scientifiques israéliens révèlent qu’une espèce de phytoplancton, Emiliania huxleyi, et un virus qui lui est étroitement lié, sont responsables d’une modulation significative de cette production. Il sont donc capables d’influencer significativement le bilan énergétique du système climatique, entre autres par leur effet potentiel sur les nuages.
Le processus est le suivant : lorsqu’Emiliania huxleyi est infectée par le virus, elle libère sa coquille composée de carbonate de calcium. Certains fragments finiront dans l’atmosphère et formeront des aérosols capables de réfléchir le rayonnement solaire, de moduler les caractéristiques nuageuses et de servir de substrat pour des réactions chimiques. Bien que la perte de coquilles soit un processus régulièrement à l’œuvre, il s’accentue de façon importante lorsque le virus infecte ladite espèce de phytoplancton. Ceci à tel point qu’au cours des expériences en laboratoire, les chercheurs ont été surpris par la quantité et la taille des particules émises. « Bien que Emiliania huxleyi soit extrêmement abondante, responsable de la prolifération d’algues sur des milliers de kilomètres, nous ne nous attendions pas à mesurer un flux aussi important d’aérosols marins émis dans l’air. De plus, nous ne nous attendions pas à un diamètre supérieur à 1 micromètre mais nous en avons mesuré juqu’à 3 à 4 micromètres. Avant ce travail, nous ne savions pas que des particules de cette taille seraient si abondantes », a déclaré Miri Trainic, auteure principale de l’étude.
Un autre point qui a surpris les scientifiques concerne la structure des aérosols émis et leurs caractéristiques aérodynamiques. Ils prennent l’allure de parachutes avec de nombreux espaces à l’intérieur, d’où une faible densité, ce qui augmente leur persistance dans l’atmosphère. Désormais, la prochaine étape pour ces chercheurs sera d’observer les propriétés de ces effervescences dans le monde réel.
* Par commodité, sont exclues de cette définition les particules nuageuses (gouttelettes d’eau, cristaux de glace, etc.).
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