La prolifération des nanosatellites inquiète les experts

Crédits : Taavi Torim / Wikimedia Commons

Le projet CubeSat inauguré en 2003 permet aux universités de participer à l’aventure spatiale en développant des satellites miniatures standardisés. 10 ans après le premier lancement, on compte plus de 200 Cubesats en orbite pour autant de projets de recherche. Un constat alarmant pour le Dr Lewis, expert en surveillance des débris spatiaux.

L’image est presque devenue courante. Des dizaines de cubes d’un mètre de côté sont aujourd’hui régulièrement relâchés par dizaines, en grappe, dans différentes couches de l’atmosphère terrestre. Le succès foudroyant de ce secteur de l’astronautique tient en deux points : miniaturisation et standardisation. En réduisant au minimum fonctionnel la taille et la masse du satellite (moins d’1.33 kg) et en diffusant un modèle standard de production, les responsables du projet Cubesat ont pu réduire drastiquement les coûts de construction et de lancement.

L’objectif était de rendre l’étude spatiale accessible aux institutions universitaires ; pari réussi puisqu’à l’heure actuelle, ce sont plus de 100 universités reliées par le projet qui peuvent directement mener expériences et mesures diverses dans l’orbite terrestre.

Hugh Lewis et le modèle DAMAGE

Aussi engageante que soit cette situation pour le progrès scientifique, elle représente un problème d’encombrement majeur pour le Dr Lewis de l’Université de Southampton. La problématique des débris spatiaux est soulevée depuis déjà plusieurs décennies mais prend une nouvelle ampleur avec la multiplication des nanosatellites ; plus de 100 Cubesats ont été lancés entre 2003 et 2012, pour un chiffre similaire en 2013.

En intégrant ces données au modèle prévisionnel DAMAGE (Debris Analysis and Monitoring Architecture to the Geosynchronous Environment), le Dr Lewis et son équipe ont simulé plusieurs scénarios pour les 30 prochaines années. Dans l’hypothèse où les lancements sont limités à 200 par an, les Cubesats s’approcheront dangereusement (17 km ou moins) et à pas moins de 16 millions de reprises d’autres objets orbitaux. La version la plus pessimiste monte à 165 millions de fois sur trois décennies.
La simulation s’est par ailleurs avérée correcte en une occasion : la première collision de Cubesat prévue pour 2013/2014 a effectivement eu lieu en mai 2013, occasionnant la perte du premier satellite lancé par la république de l’Equateur.

Les Cubesats sont conçus pour une durée de vie maximale de 25 ans afin de minimiser l’encombrement et donc les risques de collision ; le Dr Lewis estime cependant ces mesures insuffisantes. « Certains opérateurs mettent délibérement leurs appareils sur une orbite où ils peuvent rester un siècle », déclare l’expert sur le site de l’université. « Le plus grand risque vient de ceux situés à 750 km d’altitude et au-delà. Si les Cubesats continuent d’être lancés sans qu’on puisse s’en débarrasser, ils contribueront à nourrir les champs de débris. »

Toujours plus petits

Si les nanosatellites sont potentiellement problématiques, que penser alors du marché des femtosatellites ? De la taille d’un circuit imprimé et pesant 15 grammes au mieux, ces appareils pourraient se balader encore plus discrètement que leurs nano-cousins.

Jonathan McDowell, du centre d’astrophysique de Harvard-Smithsonian, imagine la situation : « Si ces engins deviennent populaires, nous aurons un gros problème de pistage » appuie le spécialiste relayé par le NewScientist.

Sources : NewScientist,  University of Southampton, Esa