Dans le sud de la France, on va recréer l’énergie produite par les étoiles

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Crédits : Vinci

Quinze ans après avoir reçu le feu vert officiel, des ingénieurs ont commencé mardi à assembler le très attendu réacteur ITER. Fruit d’une collaboration internationale, cette machine géante, construite près d’Aix-en-Provence, promet de maîtriser la fusion nucléaire. Autrement dit, l’énergie produite par les étoiles.

Nous dépendons actuellement de combustibles fossiles et de réacteurs à fission nucléaire pour produire suffisamment d’énergie. Les premiers sont polluants, et les seconds à l’origine de nombreux déchets radioactifs. C’est pourquoi, depuis plusieurs années maintenant, des parcs éoliens, solaires et hydroélectriques sont développés.

Ces énergies dites « renouvelables » sont très intéressantes sur le papier, mais elles ne sont pas suffisantes. C’est la raison pour laquelle de nombreuses têtes se tournent actuellement vers une autre source d’énergie : la fusion nucléaire. Autrement dit, l’énergie des étoiles.

Une énergie propre et illimitée

Dans chaque étoile, des réactions très violentes et très puissantes se produisent constamment. Des milliards de milliards d’atomes d’hydrogène se fracassent les uns contre les autres, ce qui a pour effet de rompre les liaisons atomiques. Ces atomes fusionnent ensuite pour former de l’hélium. Dès lors, les étoiles se mettent à briller, et à produire de la chaleur.

L’idée serait de pouvoir développer ici sur Terre les mêmes processus de fusion nucléaire, mais à plus petite échelle. Ce faisant, nous pourrions alors produire une quantité quasi illimitée d’énergie non polluante. Sur le papier, l’idée fait rêver. Le problème, c’est que maîtriser l’énergie des étoiles est plus facile à dire qu’à faire.

Pour ce faire, il faut en effet faire chauffer de l’hydrogène gazeux à plus de 100 millions de degrés jusqu’à former un nuage de plasma. Ce nuage doit ensuite être contrôlé avec des aimants puissants suffisamment longtemps pour que les atomes puissent fusionner et, finalement, libérer de l’énergie.

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Le Soleil, une source d’énergie quasi inépuisable. Crédits : NASA Goddard Space Flight Center : Wikimedia

« Le plus grand projet scientifique de l’histoire de l’humanité »

Pour relever ce défi, 35 pays coopèrent actuellement dans le cadre d’un projet baptisé ITER. L’idée : construire un réacteur à fusion nucléaire géant. Et celui-ci verra le jour en France. À Saint-Paul-lès-Durance (Bouches-du-Rhône), plus exactement.

Au cours de ces dernières années, l’entreprise Vinci s’est attelée à construire la structure du réacteur. Cette opération est aujourd’hui terminée. Désormais, il s’agit d’assembler le réacteur lui-même. Ce projet d’assemblage a d’ailleurs officiellement débuté ce mardi 28 juillet.

« Avec la fusion, le nucléaire peut être une promesse d’avenir », en nous offrant « une énergie non polluante, décarbonée, sûre et pratiquement sans déchets », a souligné le président Emmanuel Macron dans une vidéo préenregistrée diffusée lors de la cérémonie organisée sur le site.

Des représentants de sept des partenaires d’ITER se sont également exprimés lors de cette cérémonie, tous à distance. Le chef de l’Etat sud-coréen, Moon Jae-In, a salué « le plus grand projet scientifique de l’histoire de l’humanité » et cette recherche de « nouvelles frontières scientifiques et technologiques », avec ce « rêve partagé de créer une énergie propre et sûre d’ici à 2050 ».

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Le site de construction du plus puissant réacteur à fusion nucléaire du monde, dans le sud de la France. Crédits : Vinci

Le plus grand puzzle du monde

Au cours de ces dernières semaines, des centaines de milliers de composants du réacteur venus des quatre coins du monde ont été livrés sur le site. Certains, des aimants supraconducteurs extrêmement puissants, sont aussi hauts qu’un bâtiment de quatre étages et pèsent 360 tonnes chacun. Ils vont maintenant être minutieusement assemblés pour compléter ce qu’ITER décrit comme le « plus grand puzzle du monde ».

« Tous les aspects de la gestion de projet, de l’ingénierie des systèmes, de la gestion des risques et de la logistique de l’assemblage de la machine doivent fonctionner avec la précision d’une montre suisse, a déclaré le directeur général d’ITER Bernard Bigot. Nous avons un scénario complexe à suivre au cours des prochaines années ».

Quelques 2 300 personnes travailleront sur place pour assembler l’énorme machine. Ce projet devrait durer jusqu’à la fin 2024. Les premières expériences, elles, devraient débuter en décembre 2025.

ITER atteindra ensuite sa pleine puissance d’ici 2035, produisant environ 500 mégawatts d’énergie thermique, suffisamment pour alimenter 200 000 foyers.

En tant que projet expérimental, ce réacteur n’est pas conçu pour produire de l’électricité. En revanche, si la technologie fait ses preuves, alors les futurs réacteurs à fusion pourraient être capables d’alimenter plus de deux millions de foyers chacun à un coût opérationnel comparable à celui des réacteurs nucléaires conventionnels.

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