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OSIRIS-REX revient après un voyage historique de 4 milliards de kilomètres

OSIRIS-REx
Crédits : Keegan Barber/NASA

Les tout premiers échantillons d’astéroïde jamais collectés par la NASA dans l’espace lointain ont atterri en toute sécurité sur Terre dimanche dernier dans le désert de l’Utah après un voyage de sept ans dans l’espace. Que pourrait nous apprendre cette incroyable mission ?

« Un cadeau pour le monde »

Tout s’est déroulé comme prévu, à une exception près : la capsule d’échantillons larguée par la sonde américaine OSIRIS-REx s’est posée sur Terre avec cinq minutes d’avance. Il aura fallu environ vingt minutes à l’équipe de récupération pour arriver sur place, dans une zone militaire protégée du désert de l’Utah. Après une première inspection visant à s’assurer que la capsule était sans danger, des chercheurs ont collecté des échantillons de la zone d’atterrissage avant de récupérer la précieuse cargaison : environ 250 grammes de matière collectée sur la surface de l’astéroïde Bennu.

« C’est un cadeau pour le monde« , résumait ainsi le mois dernier Dante Lauretta, planétologue à l’Université d’Arizona et chercheur principal de la mission OSIRIS-REX.

En effet, Bennu, comme beaucoup d’autres astéroïdes, est une relique géologique du disque protoplanétaire (le mélange tourbillonnant de gaz et de poussières qui ont fini par fusionner pour former des planètes) qui entourait jadis notre jeune Soleil. Analyser des échantillons d’un tel objet pourrait donc permettre aux chercheurs de sonder une partie de la matière présente à cette époque lointaine dans le système solaire. D’un point de vue purement scientifique, ces informations sont inestimables.

En outre, une théorie suggère que de petits mondes comme Bennu ont ensemencé la Terre avec les ingrédients prébiotiques nécessaires à la vie telle que nous la connaissons. Là encore, l’examen de ces échantillons pourrait permettre de valider (ou non) cette idée.

OSIRIS-REx
Crédits : Keegan Barber/NASA

Ce ne sont pas les premiers échantillons rapportés sur Terre

Ces deux champs d’études ne pouvaient être exploités par l’analyse de météorites tombés sur Terre dans la mesure où elles sont chauffées par l’atmosphère avant d’être contaminées ensuite en surface. C’est pourquoi il était nécessaire de collecter des échantillons sur place, à plusieurs millions de kilomètres de la Terre.

Notez toutefois que ce ne sont pas les premiers échantillons d’astéroïdes rapportés sur Terre. En 2010, la mission Hayabusa, dirigée par l’agence spatiale japonaise, avait en effet réussi, malgré des problèmes techniques, à récupérer moins d’un milligramme de matière d’un astéroïde géocroiseur nommé Itokawa. Une décennie plus tard, une seconde mission japonaise nommée Hayabusa2 avait de son côté récupéré quelques grammes de l’astéroïde Ryugu. La nouvelle cargaison d’OSIRIS-REX fournira cependant beaucoup plus de matière avec laquelle travailler.

Une mission pleine de péripéties

Comme toutes les missions de cette envergure, celle d’OSIRIS-REX n’a jamais été simple. Le projet, initialement proposé en 2004 par une équipe de scientifiques, avait été refusé par deux fois avant d’être finalement accepté en 2011. Lancée en 2016, la sonde avait ensuite emprunté une trajectoire économe en carburant pour finalement arriver sur place le 3 décembre 2018.

Par la suite, la mission avait été confrontée plusieurs fois à l’inattendu. Les spécialistes de la mission s’attendaient notamment à ce que la surface de Bennu soit constituée de mers lisses et sablonneuses constituées de fines particules. En réalité, l’objet s’était révélé rocheux et particulièrement rugueux, ce qui annonçait un atterrissage plus difficile que prévu.

Ce n’est pas tout. Les données collectées sur place laissaient en effet entendre que Bennu rejetait quelques-uns de ses débris dans l’espace. Les scientifiques avaient alors dû effectuer frénétiquement des calculs pour s’assurer qu’OSIRIS-REX ne serait pas frappée par les panaches graveleux de l’astéroïde. L’équipe des opérations avait également dû coder un nouveau logiciel de navigation pour faire face à ce terrain accidenté.

OSIRIS-REx
Une vue de l’hémisphère sud de Bennu et de l’espace, montrant sa répartition de rochers et un panache de décombres qui s’en échappent. Crédits : NASA/Goddard/Université de l’Arizona

OSIRIS-REx a bien failli ne jamais revenir

Après deux ans d’étude de l’astéroïde, l’équipe de la mission avait finalement jeté son dévolu sur un site d’atterrissage situé au nord de l’astéroïde. OSIRIS-REX avait ensuite frappé la surface de Bennu en octobre 2020 au moyen d’un outil censé y rebondir, mais là encore, les choses ne s’étaient pas déroulées comme prévu. La surface de l’objet s’est en effet révélée beaucoup plus fragile qu’on ne le pensait, au point de manquer « d’avaler la sonde ».

Enfin, il était ressorti que la sonde avait collecté beaucoup plus d’échantillons que prévu, au point que le couvercle de son collecteur ne pouvait plus se refermer correctement. Dès lors, chaque mouvement du vaisseau spatial entraînait une perte de poussière.

Pour ne pas risquer de tout perdre, l’équipe avait alors décidé de ranger les échantillons dans la capsule de retour le plus rapidement possible, ce qui l’empêcha de réaliser les manoeuvres nécessaires pour estimer la quantité de matière collectée. Des manoeuvres ultérieures ont finalement permis de l’estimer à environ 250 grammes. Cependant, ce n’est pas une mesure très précise. Nous en saurons donc davantage dans quelques jours.

Des premiers résultats attendus en octobre

La capsule et son contenu ont depuis été stockés dans une salle blanche temporaire à proximité du site d’atterrissage de l’Utah. Ils seront transférés ce lundi au Johnson Space Center de Houston. Les scientifiques prévoient d’ouvrir la capsule mardi pour effectuer de premières analyses, dont les résultats seront connus en octobre.

Notez enfin qu’une partie de ces échantillons sera remise à d’autres agences spatiales dans le cadre d’un programme de collaboration internationale. Une autre partie sera également conservée par la NASA pour qu’elle puisse être étudiée dans plusieurs années, voire décennies, par d’autres scientifiques équipés de meilleurs instruments.