Un astronome annonce avoir identifié une preuve selon laquelle T CrB, une célèbre nova récurrente, pourrait avoir été observé par un moine en 1217. Dans un manuscrit médiéval datant de cette époque, ce dernier ferait en effet mention d’une étoile faiblement lumineuse devenue étonnamment brillante en l’espace de quelques jours dans la même région du ciel. Toutefois, comment être sûr qu’il s’agissait bien du même objet ?
Que sont les novas ?
Les novas dites « récurrentes » sont des éruptions enregistrées dans des couples d’étoiles binaires impliquant une naine blanche (le futur du Soleil) et une étoile compagne. Dans cette configuration, la première siphonne de la matière à la seconde. Lorsque suffisamment de matière s’accumule, une éruption se produit, provoquant une augmentation soudaine de la luminosité de la naine blanche.
La nova récurrente T Coronae Borealis (T CrB) est l’une des novas récurrentes les plus célèbres. Nous savons en effet que l’objet connaît en ce moment des éruptions majeures à environ 80 ans d’intervalle. Les dernières, bien documentées, ont eu lieu en 1866 et 1946. Une autre éruption est également prévue l’année prochaine. Les astronomes ont en effet déjà observé des signes avant-coureurs de l’accumulation de matière sur la naine blanche.
Compte tenu de cette étonnante régularité, il serait donc tout à fait raisonnable de consulter les archives historiques et les données astronomiques pour rechercher d’éventuelles preuves d’éruptions antérieures de cette nova, notamment vers 1786, et ainsi de suite. C’est précisément ce que vient de faire l’astronome Bradley E. Schaefer, de la Louisiana State University.

Deux anciens rapports
Dans un article publié sur arXiv, le chercheur fait état de deux observations possibles rapportées en 1217 et en 1789.
La plus récente des deux serait à mettre au crédit du révérend Francis Wollaston. Ce dernier rapporta en effet la position astrométrique d’une étoile étonnamment brillante qui se trouve juste au-dessus de T CrB. D’après ses lettres, ces observations ont été faites à au moins quatre reprises avec un grand et un petit télescope, quelques jours avant le 28 décembre 1787.
Le révérend Wollaston avait à l’époque identifié cette étoile en utilisant un nom tiré du catalogue du célèbre astronome William Herschel. Cependant, le chercheur pense qu’il s’agissait en réalité de T CrB. D’ailleurs, la magnitude limite de Wollaston pour son astrométrie était proche de 7,8 mag (magnitude apparente), ce qui signifie que T CrB était effectivement probablement en éruption.
L’événement de 1217 aurait de son côté été observé par l’abbé Burchard d’Upsberg. En scrutant le ciel du sud-ouest, en direction de la constellation de la Couronne boréale, l’homme, qui décrit un « événement merveilleux », remarqua une étoile habituellement faible en train de briller avec une intensité inhabituelle. Selon ses écrits, cette étoile continua à flamber pendant plusieurs jours.
Pour le chercheur, ce manuscrit médiéval a donc peut-être été le premier enregistrement d’un phénomène spatial rare appelé nova récurrente. Cependant, comment être sûr que cet abbé a bel et bien repéré T CrB, et non un autre phénomène céleste ?

D’autres hypothèses écartées
L’astronome s’est évidemment penché sur la question. Très vite, ses réflexions l’ont amené à exclure la possibilité d’une supernova. Et pour cause, un événement aussi violent (mort d’une étoile massive dans une explosion dramatique) aurait forcément laissé des traces derrière lui encore visibles aujourd’hui. Or, ce n’est pas le cas. De même, l’astronome a rejeté l’idée d’une planète brillante, car aucun objet de ce genre visible à l’oeil nu ne traverse cette région du ciel.
Qu’en est-il de l’hypothèse d’une comète ? D’après le chercheur, un tel objet était effectivement visible dans le ciel plus tôt cette année-là, selon une chronique du monastère Saint-Étienne en Grèce.
Cependant, rappelons que la plupart des moines de l’époque connaissaient déjà l’existence des comètes, et que leur compréhension était souvent teintée de superstition et de croyances religieuses. Ces objets étaient en effet parfois perçus comme un présage de catastrophes imminentes, telles que des famines, des guerres ou des épidémies. De ce fait, il est peu probable que l’abbé Burchard ait décrit une comète comme quelque chose de « merveilleux », ni même qu’il ait omis de mentionner sa queue distinctive.